Le 19 mars 2021, la Turquie a accusé des gardes-côtes grecs d'avoir tué au moins trois migrants en les jetant à la mer avec leurs mains entravées par des liens en plastique, tout en affirmant en avoir secouru trois autres. Des accusations réfutées «catégoriquement» par les agents grecs et portées alors que cinq pays européens se réunissaient à Athènes au sujet du nouveau pacte migratoire européen et du «mécanisme de renvoi des migrants».
Ce sont de fausses nouvelles qui font partie des efforts constants de la Turquie pour salir l'image [de la Grèce]
«La nuit dernière, les gardes-côtes grecs ont battu sept migrants, puis les ont dépouillés de leurs possessions avant de leur entraver les mains avec des menottes en plastique et de les jeter à la mer, sans gilet ni canot de sauvetage, les abandonnant à la mort», a déclaré le ministre turc de l'Intérieur Süleyman Soylu sur Twitter.
Les gardes-côtes turcs ont indiqué avoir secouru trois personnes et retrouvé trois corps sans vie en mer Egée. «Les recherches se poursuivent pour trouver la dernière personne portée disparue», ont-ils annoncé dans un communiqué.
Süleyman Soylu a par ailleurs partagé une vidéo dans laquelle un homme présenté comme l'un des rescapés affirme que le groupe de migrants dont il faisait partie avait été arrêté le 18 mars par les autorités grecques sur l'île de Chios, deux jours après avoir traversé la mer Egée depuis la Turquie. «Ils nous ont pris nos téléphones et notre argent, puis nous ont battus. Nous étions un groupe de sept personnes. Ils nous ont poussés [à la mer] à coups de pied», a-t-il déclaré dans un turc rudimentaire. Un deuxième homme présenté comme un migrant apparaît dans cette vidéo avec un collier de serrage en plastique autour des poignets. L'AFP, qui rapporte ces informations, n'était pas en mesure de les vérifier de manière indépendante.
Les gardes-côtes grecs ont nié «catégoriquement» dans la soirée du 19 mars avoir menotté et jeté à la mer les migrants. «Ce sont de fausses nouvelles qui font partie des efforts constants de la Turquie pour salir l'image» de la Grèce, ont-ils affirmé.
Les autorités helléniques ont plusieurs fois été accusées de refouler de manière illégale des migrants tentant de gagner la Grèce depuis la Turquie – des accusations rejetées par Athènes. Ankara tient notamment les forces grecques pour responsables de crevaisons de canots pneumatiques transportant des migrants afin de les empêcher d'avancer.
La Grèce, un des pays «en première ligne» face à la crise migratoire
La mer Egée est l'une des principales routes empruntées par les migrants pour se rendre illégalement en Europe. Après l'afflux en 2015 de plusieurs centaines de milliers de personnes fuyant notamment les conflits au Proche-Orient, la Turquie et l'UE ont signé en 2016 un accord controversé qui a fait chuter drastiquement le nombre de passages.
Ces accusations de la Turquie à l'encontre de la Grèce ont été émises le jour où cinq pays européens de Méditerranée, «en première ligne de réception» des migrants (Grèce, Chypre, Espagne, Italie et Malte), se sont retrouvés à Athènes pour formuler des «propositions communes» sur le nouveau pacte migratoire européen et «le mécanisme de renvoi des migrants». L'objectif de cette réunion ministérielle, intitulée Med5, était de présenter «les positions et propositions communes» de ces pays souhaitant être davantage entendus à Bruxelles sur «le fardeau migratoire» qu'ils doivent gérer, selon le ministre grec des Migrations, Notis Mitarachi.
Athènes insiste sur «l'importance de l'élaboration d'un mécanisme européen fort et efficace de renvoi obligatoire de migrants» déboutés du droit d'asile, critiquant le refus de la Turquie voisine de reprendre ces exilés.
La réunion d'Athènes intervient une semaine avant le sommet européen des 25 et 26 mars consacré aux relations UE-Turquie. Une visioconférence est prévue entre le président Recep Tayyip Erdogan et les chefs des institutions européennes après que Bruxelles a mis en garde Ankara sur les violations des droits fondamentaux.