Le Conseil du gouvernement marocain a validé le 11 mars un projet de loi qui autorise l’usage «médical, cosmétique et industriel» du cannabis en maintenant néanmoins l’interdiction des usages récréatifs. Ce projet de loi, qui doit encore être adopté par le Parlement avant son entrée en vigueur, vise à encadrer la production actuelle de cannabis en instaurant un nouveau cadre juridique et réglementaire.
Le texte prévoit notamment la création d'une «agence nationale de régulation» qui sera chargée de «développer un circuit agricole et industriel» avec des «périmètres réglementaires» et des «plants certifiés». Cette future agence sera chargée de contrôler toutes les étapes de la «chaîne de production», depuis l'importation des semences jusqu'à la commercialisation via deux types de cultures, l'une à destination médicale et cosmétique, l'autre à usage industriel. Le texte mentionne également un contrôle des teneurs en THC, principale molécule psychoactive du cannabis.
D'après une note du ministère marocain de l'Intérieur évoquée par l’AFP, le fait de légaliser l'usage thérapeutique du cannabis permettrait au pays de se positionner sur un marché «en croissance annuelle de 30% au niveau mondial et de 60% au niveau européen». Selon une étude du cabinet Grand View Research en 2017, le marché mondial du cannabis à usage médical pourrait s'élever à 55,8 milliards de dollars en 2025 (environ 50 milliards d'euros), soit cinq fois plus qu'en 2015.
Remous au sein du parti Justice et Développement
Comme le rapportent plusieurs médias marocains, ce texte a créé de vives tensions au sein du parti Justice et Développement (PJD). L’ancien chef du gouvernement, Abdelilah Benkirane, avait menacé de démissionner si le projet était adopté par les députés du parti. Quelques heures après l’adoption de ce texte de loi par le Conseil du gouvernement, il a par ailleurs annoncé sur sa page Facebook le «gel de son adhésion» au parti.
A l'heure actuelle, le Maroc est le premier producteur mondial de résine de cannabis, selon le rapport annuel 2020 de l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime (UNODC). Dans une étude publiée en 2020 par le réseau indépendant Initiative mondiale contre la criminalité transnationale organisée, la production est estimée à plus de 700 tonnes pour une valeur de 23 milliards de dollars (environ 19 milliards d'euros). Les chiffres officiels dévoilés cette semaine à Rabat font état de «55 000 hectares cultivés en 2019», essentiellement dans le Rif, une région montagneuse située dans le nord, où des dizaines de milliers de familles vivent de la culture du cannabis.