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En Irak, le pape François Ier et l'ayatollah chiite al-Sistani s'engagent pour la «paix»

Alors que le pape lui rendait visite, le leader chiite a déclaré être engagé pour la paix et la sécurité des chrétiens d'Irak. Une rencontre majeure qui s'inscrit dans le dialogue inter-religieux encouragé par François Ier lors de ce voyage.

Le pape François avait déclaré venir en Irak en «pèlerin de paix». En retour, le grand ayatollah chiite Ali al-Sistani lui a fait part ce 6 mars 2021 de son engagement pour la «paix» et la «sécurité» des chrétiens d'Irak. Le souverain pontife a ensuite rencontré des représentants des multiples communautés religieuses du pays et a plaidé en faveur des libertés de conscience et religieuse. 

Le grand ayatollah al-Sistani engagé pour «la paix et la sécurité» des chrétiens d'Irak 

Avant cela, le chef des 1,3 milliard de catholiques de la planète s'était entretenu pendant près d'une heure avec le grand ayatollah Ali al-Sistani, qui l'a reçu dans sa modeste demeure. Ali al-Sistani, 90 ans, est la référence religieuse de la plupart des 200 millions de chiites d'Irak et d'ailleurs. 

Le dignitaire musulman s'est exprimé en ces termes, notamment rapportés par l'agence Associated Press : «Les dirigeants religieux et spirituels doivent jouer un rôle important pour mettre un terme à la tragédie […] et exhorter les parties – en particulier les grandes puissances – à faire prévaloir la sagesse et le bon sens, et à effacer le langage de la guerre». Selon lui, les grandes puissances ne doivent pas «défendre leurs propres intérêts au détriment du droit des peuples à vivre dans la liberté et la dignité». A l'issue de ce huis clos, une rencontre religieuse qui peut être considérée comme l'une des plus importantes de l'histoire, le grand ayatollah al-Sistani a également affirmé au pape être engagé pour garantir la «paix», la «sécurité» et «tous les droits constitutionnels» aux chrétiens d'Irak. Il a par ailleurs souhaité le bonheur à François Ier et aux fidèles de l'Église catholique.

La communauté chrétienne d'Irak, l'une des plus anciennes au monde, s'est réduite comme peau de chagrin depuis 20 ans. Elle est passée de 1,5 million de membres à quelque 400 000 en raison des violences subies et de la pauvreté endémique dans ce pays de 39 millions d'habitants. Ces chrétiens d'Orient se plaignent régulièrement de ne pas être soutenus par l'Etat irakien face à des miliciens ou politiciens qui s'approprient leurs maisons ou terres, et assurent être pénalisés dans leur accès à l'emploi. 

Après cette rencontre au sommet dans la ville sainte chiite de Nadjaf (où réside Ali al-Sistani), le pape a entamé le point d'orgue spirituel de son voyage : le pèlerinage à Ur, ville natale d'Abraham dans le sud de l'Irak, pour prier en faveur de la «liberté» et l'«unité» afin de mettre fin aux guerres et au terrorisme. C'est là, dans la plaine désertique où est né le père des monothéismes que Jean-Paul II voulait déjà venir en 2000, avant d'en être empêché par Saddam Hussein.

François, connu pour ses mains tendues tous azimuts aux autres religions, y a ajouté sa touche : il a tenu à prier avec des dignitaires musulmans chiites et sunnites, mais aussi yézidis – une petite minorité martyrisée par les djihadistes de Daesh –, sabéens et zoroastriens.

«Le terrorisme abuse de la religion»

Au-delà du cas des chrétiens, le pape François est revenu longuement lors du deuxième jour de ce voyage en Irak sur les guerres qui n'ont cessé de déchirer l'ensemble du pays et le Moyen-Orient depuis 40 ans. «Hostilité, extrémisme et violence […] sont des trahisons de la religion. Et nous, croyants, nous ne pouvons pas nous taire lorsque le terrorisme abuse de la religion», a-t-il déclaré dans un pays dont un tiers du territoire était contrôlé par Daesh en 2014.

L'organisation djihadiste avait également fait des ravages en Syrie voisine, ce que le pape n'a cessé d'évoquer dans ses discours depuis son arrivée en Irak, le 5 mars. Il a appelé à prier pour un cheminement «du conflit à l'unité» dans tout le Moyen-Orient, et en particulier dans la «Syrie martyrisée».

Comme il l'avait déjà fait au Maroc, autre pays musulman où il avait tenu à se rendre, le pape de 84 ans a plaidé pour «la liberté de conscience et la liberté religieuse». Celles-ci doivent être «respectées et reconnues partout», car elles sont «des droits fondamentaux», a-t-il affirmé. La liberté de conscience consiste à pouvoir croire ou ne pas croire, mais aussi avoir le droit de se convertir librement. La liberté religieuse, terme plus général, comprend notamment la liberté d'exercer son culte sans entraves.

Le pape poursuivra ensuite son voyage – sous haute protection et en confinement total du fait de la pandémie – avec une messe célébrée dans l'église Saint-Joseph de Bagdad.