Le ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, était auditionné le 2 mars par la Commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale. Durant plusieurs heures, le ministre s’est expliqué sur la politique extérieure de la France et a répondu à de nombreuses questions formulées par les députés.
Dans son intervention, Jean-Yves Le Drian a souligné l’ancrage transatlantique de la France et s’est félicité des premières «bonnes nouvelles» venues de l'administration de Joe Biden. Il a notamment salué la volonté des Etats-Unis de revenir dans l’accord de Paris sur le climat, accueilli favorablement la décision américaine de lever son veto sur la nomination de l’ancienne ministre nigérienne, Ngozi Okonjo-Iweala, à la tête de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), et approuvé leur souhait de ne plus quitter l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en précisant qu’il était «ahurissant» de se retirer de l’OMS en pleine crise épidémique mondiale. Le ministre a souligné que cette «volonté de rupture» avec la précédente administration permettrait la mise en place d’une «nouvelle alliance transatlantique».
Concernant l'OTAN, le ministre a déclaré qu’il faudrait que la France «discute avec les Américains sur la manière dont on travaille au sein de l’OTAN». Il a notamment évoqué la tenue d'un sommet de l’alliance très prochainement afin de redéfinir les objectifs stratégiques de l’organisation, considérant qu’il fallait «mettre sur la table» les trois grands défis qui se posaient aujourd'hui, à savoir la cohésion entre les alliés (le ministre a évoqué la possibilité d’aboutir à un code de bonne conduite à ce sujet), l’implication des européens et l’identification des menaces et défis sécuritaires.
La Russie, «un voisin parfois désagréable, parfois horripilant»
A propos de la position de la France vis-à-vis de la Russie, le ministre s’est montré particulièrement critique à l’égard des autorités russes, dénonçant ce qui s'apparente selon lui à «une dérive autoritaire qui est très grave». Le ministre a évoqué également des arrestations arbitraires de journalistes et regretté les expulsions de diplomates européens qui sont «injustifiées» selon lui. La Russie avait en effet expulsé des diplomates polonais, suédois et allemand qu'elle accusait d'avoir pris part à des manifestations en soutien à Alexeï Navalny. La peine de prison avec sursis purgée par l'opposant russe a été transformée en prison ferme après qu'il a failli à plusieurs reprises, selon la justice russe, à s'enregistrer auprès de l'administration pénitentiaire, comme l'exigeait son sursis.
Sur cette affaire, Jean-Yves Le Drian a appelé à sa libération immédiate (une position vue par Moscou comme une forme d'«ingérence»), en précisant que la France était favorable aux sanctions prises au niveau européen.
Jean-Yves Le Drian a néanmoins tenu à souligner que la France devait «garder une relation de long terme avec la Russie et garder des canaux de discussion», car, selon lui, «même si c’est un voisin parfois désagréable, parfois horripilant, parfois insupportable, parfois tout à fait condamnable», la Russie est un voisin de la France et «ne va pas déménager». Il a par ailleurs accueilli très favorablement la décision des autorités russes et américaines de prolonger de 5 ans le traité (New Start) qui permet de limiter réciproquement l’arsenal nucléaire des deux puissances. «Depuis quelques années, il y avait une disparition quasiment systématique des accords bilatéraux dans le domaine militaire», a-t-il conclu sur ce point.