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Navalny risque de la prison ferme alors qu'une nouvelle enquête pour fraude a été ouverte contre lui

Le Service fédéral pénitentiaire de Russie pourrait demander de remplacer sa peine avec sursis par 3 ans et demi de prison ferme s'il ne rentre pas à Moscou. Dans le même temps une nouvelle enquête pour fraudes visant l'opposant a été ouverte.

Selon la Direction principale du Service fédéral pénitentiaire de Moscou, Alexeï Navalny ne remplissait pas les engagements qui lui étaient assignés par le tribunal dans le cadre de l'affaire Yves Rocher et échappait au contrôle de l'inspection exécutive pénale. Ainsi, sa peine avec sursis pourrait être remplacée par un emprisonnement s'il ne se présente pas physiquement au Service fédéral à 9h le 29 décembre, a annoncé le 28 décembre son avocat Vadim Kobzev.

«Le 22 décembre 2020, la revue The Lancet a publié un article basé sur les matériaux de la clinique allemande, Charité, recueillis lors du traitement du citoyen de la Fédération de Russie Alexeï Navalny. Selon l’article, Alexeï Navalny est sorti de la clinique le 20 septembre 2020 et dès le 12 octobre, toutes les séquelles de sa maladie avaient disparues. Ainsi, la personne condamnée à une peine avec sursis ne remplit pas les engagements qui lui ont été assignés par le tribunal et échappe au contrôle de l'inspection exécutive pénale», a précisé dans un message le Service fédéral pénitentiaire.

La publication qui ne cite pas le nom de Navalny, évoque l'incident survenu le 20 août dernier lorsqu'un «homme âgé de 44 ans est tombé soudainement malade dans un avion environ 10 minutes après le départ». Comme il a été révélé plus tard, Navalny a été victime d'un malaise à bord d'un avion entre la Sibérie et Moscou. Hospitalisé dans un premier temps à Omsk, en Sibérie, il a été transféré le 22 août à la clinique de la Charité à Berlin, où les autorités ont acquis la certitude qu'il avait été victime d'un empoisonnement. Navalny reste actuellement en Allemagne.

Toutefois, le Service fédéral pénitentiaire considère que l'opposant, en tant qu'une personne condamnée à une peine avec sursis, «ne remplissait pas systématiquement les engagements qui lui ont été assignées par le tribunal ou échappait au contrôle». Cela pourrait permettre aux autorités de déposer une requête auprès du tribunal pour remplacer la peine avec sursis par un emprisonnement en vertu de la partie 4 de l'article 190 du Code exécutif pénal de la Fédération de Russie. 

Actuellement, Alexeï Navalny est en période de probation dans le cadre de l’affaire Yves Rocher. Il a été reconnu coupable de fraude ainsi que de blanchiment de fonds obtenus par des moyens illicites. Сonformément à la décision du tribunal du 30 décembre 2014, il a été condamné à une peine de 3 ans et demi avec sursis avec une période de probation de cinq ans. La période probatoire a ensuite été prolongée d'un an et prendra donc fin le 30 décembre 2020. En conséquence, si le tribunal a pris le parti du Service fédéral pénitentiaire, Navalny risque une prison ferme.

Le délai annoncé expiré, le Service fédéral pénitentiaire russe n'a pour l'heure fait aucune nouvelle annonce concernant le cas de l'opposant russe et sa peine.

Une nouvelle enquête ouverte pour fraudes à grande échelle

Dans le même temps, une nouvelle enquête pour fraudes à grande échelle a été ouverte en Russie contre Alexeï Navalny, ont annoncé ce mardi les autorités russes. Celle-ci n'a aucun rapport avec l'affaire Yves Rocher ni avec la demande du Service fédéral pénitentiaire russe.

Dans un communiqué, le Comité d'enquête russe a fait savoir que Navalny est soupçonné d'avoir dépensé pour son usage personnel 356 millions de roubles (3,9 millions d'euros au taux actuel) de dons récoltés par plusieurs organisations notamment, selon les autorités, des associations de lutte contre la corruption ou de protection des droits humains. Les autorités évoquent notamment des dons au Fonds de lutte contre la corruption, fondé par l'opposant, et cinq autres entités  dont Navalny est de fait le directeur.

Le Comité d'enquête soutient qu'Alexeï Navalny a utilisé cette somme «pour l'acquisition de biens personnels et matériels, ainsi que le paiement de dépenses (y compris des vacances à l'étranger)». La loi russe prévoit jusqu'à 10 ans d'emprisonnement pour ce délit.

Navalny dénonce «une crise d'hystérie»

«On dirait que (Vladimir) Poutine fait une crise d'hystérie», a réagi l'opposant, sur son compte Twitter. Il a appelé ses partisans à se moquer de cette nouvelle enquête en continuant à faire des dons à ses organisations.

Il a également soutenu que cette nouvelle affaire était lié à son empoisonnement présumé en Sibérie, fin août, lors duquel il affirme avoir été victime d'une attaque à un agent neurotoxique, sur ordre du Kremlin. «Ils essayent de m'envoyer en prison car je ne suis pas mort et que j'ai cherché ensuite mes meurtriers», a affirmé Alexeï Navalny.

L'opposant a publié la semaine dernière une vidéo d'une conversation téléphonique avec un membre présumé du FSB dans laquelle ce dernier, pensant parler à un responsable du renseignement, explique que les services spéciaux russes ont bien empoisonné Alexeï Navalny. Les autorités ont qualifié cette conversation de falsification mais n'ont jamais démenti que l'interlocuteur de l'opposant était bien un agent.