Le 23 septembre, la Commission européenne a dévoilé le contenu de son nouveau Pacte sur la migration et l'asile. Cinq ans après la crise des migrants de 2015, l'objectif affiché est de surmonter les tensions entre les pays membres, et de trouver un compromis entre contrôle et solidarité.
La présidente de la Commission Ursula von der Leyen a ainsi défendu un équilibre «juste et raisonnable» entre «responsabilité et solidarité» entre les 27. «Nous devons trouver des solutions pérennes sur la migration», a-t-elle déclaré, soulignant que l'incendie du camp de Moria, le 9 septembre dernier, en était un rappel brutal.
Durcissement du renvoi des migrants irréguliers et «mécanisme de solidarité obligatoire»
Ce nouveau pacte prévoit que les pays de l'UE qui ne veulent pas prendre de demandeurs d'asile en cas d'afflux devront en revanche participer au renvoi vers leur Etat d'origine des déboutés du droit d'asile, et ce depuis le pays européen où ils sont arrivés. Si un pays est soumis à une «pression» migratoire et estime ne pas pouvoir assumer la prise en charge des migrants, il pourra ainsi demander à la Commission l'activation d'un «mécanisme de solidarité obligatoire».
L'exécutif européen évaluera alors le nombre de migrants à prendre en charge. Tous les Etats sont mis à contribution, en fonction de leur poids économique et de leur population. Mais ils ont le choix entre accueillir des demandeurs d'asile, «parrainer» le renvoi dans son pays d'un migrant n'ayant pas le droit de rester dans l'UE, ou aider à la construction de centres d'accueil.
Une façon de contourner le refus persistant de plusieurs pays, notamment ceux du groupe de Visegrad (Pologne, Hongrie, République tchèque, Slovaquie) d'accueillir des migrants ; et de tirer les leçons de l'échec des quotas de relocalisation décidés après 2015. Un échec rappelé le 22 septembre par le chancelier autrichien Sebastian Kurz, pour qui la répartition des migrants «ne marche pas».
Révision du règlement de Dublin
Le nouveau pacte révise également le règlement Dublin, pilier actuel du système d'asile en Europe, qui fait porter au premier pays d'entrée d'un migrant dans l'UE, la responsabilité de traiter sa demande d'asile. Un système qui n'a cessé d'alimenter les tensions entre les Etats membres, en raison de la charge qu'il fait porter aux pays géographiquement en première ligne des arrivées, tels que la Grèce et l'Italie.
Dans la proposition de la Commission, le pays responsable de la demande d'asile pourra être celui dans lequel un migrant a un frère ou une sœur, dans lequel il a travaillé ou fait ses études. Ce sera aussi celui qui a délivré un visa à un migrant qui devra se charger de la demande d'asile. A l'exception de ces cas, les pays de première arrivée resteront chargés de la demande.
Est également prévu un processus accéléré pour écarter plus rapidement les migrants qui sont peu susceptibles d'obtenir une protection internationale. Il s'agit, selon la Commission, de ceux venant des pays ayant un taux de réponse positive aux demandes d'asile inférieur à 20%, comme la Tunisie ou le Maroc. Pour les ressortissants de ces pays, le traitement de la demande d'asile se fera à la frontière et dans un délai de 12 semaines.
Un nouveau pacte bien accueilli à Rome, Budapest circonspect
Le chef du gouvernement italien Giuseppe Conte a estimé que la proposition de la Commission représentait «un pas important», mais pas encore suffisant, vers une approche «vraiment européenne». Des élus du Mouvement 5 Etoiles, un des deux piliers de la coalition gouvernementale, ont également estimé que la proposition de la Commission européenne était «un bon point de départ» mais qu'elle avait «besoin d'être améliorée».
L'Italie estime en effet que l'UE n'a pas montré la solidarité nécessaire lors des arrivées massives de migrants ces dernières années et s'est battue pour le principe d'une relocalisation automatique et obligatoire entre les 27 Etats membres de l'Union, une proposition que la Commission n'a finalement pas retenue.
Du côté de la Hongrie, membre du groupe de Visegrad et opposant de longue date de la politique migratoire européenne, le caractère obligatoire du mécanisme de solidarité ne passe pas. «La solidarité, ça ne s'impose pas. C'est un mouvement qui doit être spontané», avait expliqué un responsable hongrois au Point, la veille de la présentation de la réforme.