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La chaîne M6 interdite en Algérie après la diffusion d'un documentaire sur le mouvement «Hirak»

La chaîne de télévision française M6 ne sera plus autorisée à diffuser en Algérie. Le ministère algérien de la Communication l'a annoncé après la diffusion d'un documentaire dans l'émission Enquête exclusive au sujet du mouvement populaire «Hirak».

Le ministère algérien de la Communication a décidé de «ne plus autoriser» la chaîne de télévision privée française M6 à opérer en Algérie, après la diffusion d'un documentaire sur le mouvement de protestation populaire «Hirak» dans le pays le 20 septembre. 

Ce précédent nous conduit à décider de ne plus autoriser M6 à opérer en Algérie, sous quelque forme que ce soit

Dans un communiqué publié le 21 septembre au soir, le ministère de la Communication accuse ce documentaire intitulé L'Algérie, le pays de toutes les révoltes de «porter un regard biaisé sur le Hirak» et d'avoir été réalisé par une équipe munie d'une «fausse autorisation de tournage». «Ce précédent nous conduit à décider de ne plus autoriser M6 à opérer en Algérie, sous quelque forme que ce soit», affirme le ministère.

Présenté dans le cadre de l’émission Enquête exclusive, ce reportage de 75 minutes filmé par moments avec des «caméras discrètes» expose les témoignages de trois jeunes Algériens sur l'avenir de leur pays, en proie à un soulèvement inédit depuis février 2019. La crise sanitaire a entraîné la suspension des marches du «Hirak» à la mi-mars.

Le ministère de la Communication fustige des «témoignages insipides», des «clichés les plus réducteurs» et «une somme d’anecdotes sans profondeur».

Le ministère promet d'engager des poursuites contre les auteurs du reportage

L'une des protagonistes de l'enquête, Noor, une YouTubeuse connue en Algérie, a expliqué le 21 septembre sur les réseaux sociaux qu'elle regrettait avoir participé au documentaire et a déploré «le manque de professionnalisme» de la chaîne française.

Selon le communiqué algérien, «une journaliste franco-algérienne a assuré la réalisation du film, avec l’aide d’un fixeur algérien, munis d’une fausse autorisation de tournage», une infraction «au demeurant sévèrement sanctionnée».

Le ministère promet d'engager des poursuites contre les auteurs du reportage pour «faux en écriture authentique ou publique». Il «n’est pas fortuit que ces médias, outillés pour exécuter un agenda visant à ternir l’image de l’Algérie et à fissurer la confiance indéfectible établie entre le peuple algérien et ses institutions, agissent de concert et à différents niveaux et supports», estime-t-il.

Selon le ministère, M6 avait introduit le 6 mars 2020 une demande d’accréditation de presse pour les membres de l’équipe de l’émission Enquête exclusive, en vue du tournage d’un documentaire sur «la valorisation de l’essor économique et touristique de la ville d’Oran, ainsi que le multiculturalisme qui fait la richesse de notre pays». Demande qui aurait reçu une suite défavorable des services des ministères de la Communication et des Affaires étrangères.

M6 balaie les accusations des autorités algériennes

Dans un communiqué publié le 22 septembre, M6 a assuré que ce reportage a bien été réalisé par une équipe qui bénéficiait d’une autorisation de tournage délivrée initialement en mai 2018 et prolongée plusieurs fois jusqu’en 2019.

L’équipe de tournage a d’ailleurs «été contrôlée à plusieurs reprises par les autorités algériennes», qui l’ont laissée travailler au vu de cette autorisation.

En revanche, d’autres demandes d’autorisation présentées par Enquête exclusive en mars 2020, pour pouvoir filmer des séquences en plateaux depuis Oran, ont elles été refusées par les autorités algériennes et elles «n'ont donné lieu à aucun tournage en Algérie», assure la chaîne.

«M6 renouvelle sa confiance au producteur [du reportage] Patrick Spica ainsi qu’aux journalistes qui ont réalisé cette enquête dans le respect des principes déontologiques attachés à leur profession», a ajouté la chaîne, ajoutant que «les évolutions de la société algérienne constituent un sujet d’intérêt général qui mérite d’être traité dans le cadre du droit légitime à l'information du public».

Dans le même élan, M6 «demande aux autorités algériennes de revenir sur leur position de boycott afin de poursuivre de façon objective et sans aucune polémique sa mission d’information».

La diffusion en mai dernier par la chaîne publique France 5 d'un autre documentaire sur la jeunesse algérienne et le «Hirak», Algérie mon amour, du journaliste et réalisateur français d’origine algérienne Mustapha Kessous avait déclenché une crise diplomatique entre Alger et Paris.