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La France s'émeut du sort des Ouïghours, Pékin dénonce «ingérence» et «mensonges»

Alors que la diplomatie française avait sévèrement critiqué l'internement «inacceptable» de membres de la minorité ouïghoure, Pékin a vivement réagi, défendant sa politique dans la région au nom de la lutte contre «le terrorisme et le séparatisme».

Pressé de répondre aux critiques de Paris concernant la situation de la minorité musulmane ouïghoure au Xinjiang, un porte-parole de la diplomatie chinoise s'est fait on ne peut plus clair, assurant que la politique de son pays dans la région ne relevait pas des questions de droits de l'Homme ou de la liberté de culte, mais de la lutte contre «le terrorisme et le séparatisme».

Nous sommes fermement opposés à l'utilisation des questions religieuses à des fins politiques et d'ingérence dans les affaires intérieures de la Chine

«Nous sommes fermement opposés à l'utilisation des questions religieuses à des fins politiques et d'ingérence dans les affaires intérieures de la Chine», a précisé Wang Wenbin lors d'un point presse, ajoutant que la politique de Pékin ne visait «aucun groupe ethnique spécifique ni religion». Le diplomate a par ailleurs dénoncé les «mensonges» selon lesquels les centres de formation professionnelle au Xinjiang seraient «des camps de concentration» où plus d'un million de Ouïghours seraient emprisonnés. 

La réaction de Pékin intervient après les déclarations du ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, qui, devant l'Assemblée nationale le 21 juillet, avait jugé «inacceptable» l'internement de membres de la minorité ouïghoure. Le chef de la diplomatie française avait ainsi réclamé l'accès d'observateurs indépendants internationaux au Xinjiang, évoquant «des camps d'internement pour les Ouïghours, des détentions massives, des disparitions, du travail forcé, des stérilisations forcées, la destruction du patrimoine culturel ouïghour et en particulier des lieux de culte, la surveillance de la population et plus globalement tout le système répressif mis en place dans cette région».

Pression internationale

Les commentaires de la diplomatie française interviennent alors que de graves accusations se multiplient en France contre Pékin sur la question des Ouïghours. Le journal Libération a notamment titré le 21 juillet sur le «génocide en cours» contre la cette communauté, publiant le témoignage d'une victime de stérilisation forcée.

Le député Aurélien Taché (EDS) a, de son côté, soumis au chef de l'Etat la demande de 30 parlementaires de «traduire la Chine devant la Cour pénale internationale pour crimes contre l'humanité au regard des persécutions qu'elle a fait subir à la communauté ouïghoure dans le Xinjiang». De même, l'eurodéputé français Raphaël Glucksmann que «l’UE et la France [annoncent] des sanctions contre les dirigeants chinois impliqués dans ce crime contre l’humanité».

Une campagne faisant écho aux sanctions émises début juillet par Washington contre plusieurs dirigeants chinois, interdits d'entrer aux Etats-Unis pour leur rôle supposé dans la répression de la minorité musulmane ouïghoure, en «violation flagrante des droits de l'Homme».

Les Ouïghours constituent le principal groupe ethnique du Xinjiang, une immense région qui a notamment des frontières communes avec l'Afghanistan et le Pakistan. Régulièrement frappée par des attentats meurtriers, attribués par Pékin à des séparatistes ou des islamistes ouïghours, elle est sous haute surveillance policière. Des organisations de défense des droits de l'Homme accusent Pékin d'avoir fait interner jusqu'à un million de musulmans, principalement d'ethnie ouïghoure, dans des camps de la région au nom de la lutte antiterroriste. Pour sa part, la Chine dément ce chiffre et affirme que ces personnes sont emmenées dans des centres de formation professionnelle, destinés à les aider à trouver un emploi afin de les éloigner de la tentation de l'extrémisme.