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Le remdesivir, espoir pour certains face au Covid-19

Créé pour lutter contre Ebola, le remdesivir aurait aidé des malades en état grave à se rétablir 31% plus vite, selon les premiers résultats cliniques. Soutenus par Washington, les laboratoires Gilead défendent leur molécule. Entre espoir et doutes.

Quatre mois après le début de l'épidémie de Covid-19, le gouvernement américain a créé l'espoir le 29 avril en rapportant qu'un médicament naguère développé contre Ebola, le remdesivir, semblait avoir prise sur le coronavirus, et avait accéléré de plusieurs jours le rétablissement des cas les plus graves lors d'un grand essai clinique.

Certains considèrent cette «percée» thérapeutique comme la plus notable contre le coronavirus, même si des experts préviennent que les résultats définitifs n'ont pas encore été publiés. De son côté, l'infectiologue français Didier Raoult a déjà émis un avis plus réservé à la lecture de deux études sur cette molécule.

Si de multiples traitements sont testés dans les hôpitaux du monde entier, aucun n'a encore prouvé son efficacité dans un essai aussi grand et rigoureux, avec placebo. Aucun vaccin ne devrait voir le jour avant la fin 2020 au plus tôt. 

En France, le directeur général de la Santé  Jérôme Salomon a quant à lui préféré constaté «une évolution favorable de certains patients traités, mais qui n'est pas très nette». «Nous n'avons pas de résultats spectaculaires, ce sont des résultats préliminaires et qui nécessitent une publication. Cette molécule est utilisée dans trois cliniques en France et testée dans le grand essai européen Discovery», a aussi confié Jérôme Salomon dans sa conférence de presse du 30 avril.

Essai clinique contre placebo incluant un millier de patients

Les Instituts de santé américains (NIH) ont annoncé que le médicament expérimental remdesivir, du laboratoire américain Gilead, avait aidé des malades hospitalisés à se rétablir 31% plus vite, selon les résultats préliminaires d'un essai clinique contre placebo incluant un millier de patients, aux Etats-Unis et ailleurs.

Le patron de Gilead Sciences, Daniel O'Day, a annoncé que le laboratoire disposait actuellement de 1,5 million de doses qui seraient offertes pour traiter au moins 140 000 patients. Gilead vendra ensuite le remdesivir à un prix «abordable», a-t-il confié au site Stat.

En revanche, les résultats préliminaires ne montrent pas si le médicament permet de sauver des vies. La mortalité du groupe de patients traités au remdesivir était de 8%, contre 11,6% dans le groupe témoin ; une différence trop faible pour exclure que ce soit le fruit du hasard. L'essai a inclus 1 063 patients hospitalisés avec une forme avancée de Covid et des problèmes pulmonaires sur 47 sites aux Etats-Unis et 21 autres en Europe et en Asie. Le traitement, par injection intraveineuse, durait 10 jours.

Le 29 avril, un essai clinique mondial distinct, sans placebo, mené par Gilead lui-même a indiqué qu'un traitement de cinq jours est aussi efficace que celui mené pendant 10 jours, ce qui permettrait de traiter plus de patients avec un stock donné, et de réduire la durée d'hospitalisation. 

Wahington restreint l'hydroxychloroquine et soutient le remdesivir

De multiples essais sont en cours dans le monde pour tester le remdesivir, d'autres antiviraux ou encore l’hydroxychloroquine, un médicament contre le paludisme que beaucoup d'hôpitaux ont expérimenté, encouragés par le professeur français Didier Raoult, en conjonction avec un antibiotique.

Les résultats du grand essai Discovery sur 3 200 patients européens sont particulièrement attendus.

En attendant, les autorités sanitaires américaines ont formellement déconseillé l'utilisation d'hydroxychloroquine hors hôpital il y a quelques jours en raison de risques pour le cœur. Dès l'annonce des laboratoires Gilead, le président Donald Trump a demandé à l'Agence américaine du médicament (FDA) d'accorder «rapidement» une autorisation d'utilisation du remdisivr pour les hôpitaux, hors d'essais cliniques.

L'annonce de Washington relativise l'importance de résultats non concluants d'une petite étude sur le remdesivir (237 patients), menée dans dix hôpitaux de Wuhan, en Chine, et publiée le 29 avril par la revue médicale The Lancet

Dans l'essai chinois, les malades traités avec le remdesivir n'ont pas fait mieux que ceux traités par placebo. Mais la taille de l'essai, interrompu faute de malades en raison de la fin de l'épidémie à Wuhan, limite l'interprétation des résultats.

Hydroxycloroquine ou remdesivir ? La course au traitement est donc lancée. Et dans ce sprint, le laboratoire américain Gilead semble prendre une longueur d'avance, son action ayant enregistré une hausse de 8 % en 24 heures.