International

«L'économie avant l'humain» ? En Belgique, le déconfinement en trois étapes ne fait pas l'unanimité

Le gouvernement belge a convenu d'un plan de déconfinement qui aura lieu en trois phases, les 4, 11 et 18 mai. Selon les priorités fixées, la réouverture des commerces est prévue avant le retour des visites de famille. L'opposition ne décolère pas.

Pendant une semaine, les Belges pourront revoir leur famille... uniquement dans les magasins. C'est en substance ce qu'a reconnu, sur le ton de la plaisanterie, le vice-Premier ministre Alexander De Croo, après certaines critiques sur le choix des priorités dans le cadre du plan de déconfinement par étapes qui doit débuter le 4 mai en Belgique.

Un plan en trois phases

Le 24 avril, le Premier ministre belge Sophie Wilmès a en effet rendu public le plan de déconfinement progressif finalisé par les autorités au terme d'une réunion de plus de 7 heures. Décidé mi-mars dans le royaume, qui a été durement touché par l'épidémie de Covid-19 (la Belgique se classe en tête du classement des décès de l'épidémie par habitant), le confinement sera levé en plusieurs phases à partir du 4 mai, date de la première phase. A cette date, les merceries et magasins de tissu pourront rouvrir (pour aider la confection des masques), alors que les autres commerces non-essentiels ne rouvriront qu'à partir de la seconde phase, le 11 mai, à condition que les mesures de distanciation sociale soient respectées.

Mais les réunions privées à domicile et autres visites familiales ne seront toujours pas permises au cours de cette deuxième étape. Ce n'est en effet qu'à partir du 18 mai, que seront étudiées les possibilités du retour à une vie sociale, impliquant un retour progressif à l'école, aux célébrations de mariages, aux cérémonies funéraires, ou encore à la mobilité au sein du pays. 

Un cadeau au «lobby des grandes entreprises», selon le PTB

Reste un élément qui suscite l'incompréhension au sein de l'opposition : «Relancer l'industrie et les commerces sans autoriser les personnes à retrouver leurs proches, c'est faire passer l'économie avant l'humain, nous ne pouvons le concevoir», s'offusque le parti Ecolo (le parti Vert francophone en Belgique) dans un communiqué signé par Rajae Maouane et Jean-Marc Nollet, les présidents du parti, qui participe par ailleurs aux gouvernements wallon et bruxellois.

A gauche, le porte-parole national du PTB Raoul Hedebouw souligne : «"Les gens d'abord, pas le profit !" : Jamais le baseline du PTB n'a été autant d'actualité...» Dans un communiqué publié sur son site, le même parti déplore encore : «Le lobby des grandes entreprises est plus grand que le lobby du cœur.»

Le député bruxellois CDH (centre) Georges Dallemagne a pour sa part regretté sur Twitter : «Rien pour les familles dans le déconfinement partiel prévu le 4 mai par les gouvernements du pays.»

Les Belges pourront voir leurs parents... «chez Hema»

Abordant le plan de déconfinement du gouvernement belge, le vice-Premier ministre Alexander De Croo s'est vu mettre au pied du mur le 25 avril sur la chaîne VTM. «Je peux donc voir ma mère, par exemple chez Hema ou Zara ?», a interrogé la journaliste flamande. «Oui... Vraisemblablement, ce sera bien possible, mais peut-être avec un masque de protection», a répondu Alexander De Croo après un bref moment d'hésitation.

Un argument qui n'a pas convaincu tout le monde. «Sérieusement [...] encore combien de temps cette mauvaise blague ?», s'interroge sur Twitter Sébastien Dupanloup, du syndicat FGTB.

Le Premier ministre tacle Ecolo

Plus sérieusement, le Premier ministre Sophie Wilmès a abordé la polémique sans ménager les écologistes. «Ecolo semble oublier que toutes ces mesures sont prises en concertation avec les entités fédérées [...] Ils font partie de ces gouvernements», a-t-elle taclé. Sur le fond des reproches, Sophie Wilmès a déploré que l'opposition «binarise le monde», entre l'aspect économique et humain de la société et a catégoriquement nié que le gouvernement ait «négligé l'humain».

Réouverture progressive des écoles, restaurants et bars fermés

Après un test le 15 mai en Flandres, la troisième étape du plan de déconfinement prévoit une réouverture en douceur des écoles à partir du 18 mai, avec un maximum de 10 élèves par classe. Les dernières années de l'enseignement primaire et secondaire seront prioritaires ainsi que la première année de primaire. Les classes maternelles pourraient ne pas rouvrir cette année.

Dans les transports publics, le port d'un masque couvrant nez et bouche sera obligatoire dès le 4 mai pour toute personne âgée d'au moins 12 ans.

«Le port d'un masque en tissu, de confort, jouera un rôle clé dans la stratégie de déconfinement», a assuré Sophie Wilmès en rappelant aussi l'importance de l'hygiène des mains et des gestes barrières qui seront notamment très contrôlés dans les écoles.

Aucun calendrier n'a en revanche été fixé pour la réouverture de l'horeca (hôtels, restaurants, cafés), mais la question devrait être abordée d'ici au 8 juin, date d'une nouvelle phase de déconfinement qui reste pour l'heure «très hypothétique», selon les termes de la RTBF. Quant aux festivals, a rappelé le Premier ministre, ils restent annulés jusqu'au 31 août même si des événements plus modestes pourraient être organisés en plein air. La question des déplacements à l'étranger n'a pas, pour l'heure, été abordée.

Le virus a tué près de 7 000 personnes dans le pays. Avec un ratio d'environ 60 morts pour 100 000 habitants au 25 avril, le royaume est le pays du monde où l'épidémie a fait le plus de victimes proportionnellement au nombre d'habitants, rapportait Le Parisien