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Coronavirus : pour l'Iran, l'aide proposée par Washington est «le plus gros mensonge de l'histoire»

Le président et le guide suprême iraniens ont tous deux rejeté les propositions d'aide humanitaire américaine dans la lutte contre le Covid-19 alors que le pays peine à combattre l'épidémie, notamment en raison des sanctions de Washington.

«Les dirigeants américains mentent [...] s'ils veulent aider l'Iran, la seule chose qu'ils doivent faire c'est de lever les sanctions [économiques]», c'est par ces mots que le président de la République islamique d'Iran Hassan Rohani a rejeté les propositions d'aide humanitaire de Washington à son pays, lors d'un discours diffusé le 23 mars à la télévision. 

Le président américain Donald Trump, dont le pays impose des sanctions économiques compliquant lourdement toute transaction financière ou commerciale entre l'Iran et le reste du monde, a affirmé le 29 février être prêt à aider Téhéran à combattre le Covid-19, à condition que ses dirigeants le demandent.

«Nous nous méfions des intentions des Américains et ne comptons pas sur ces aides», avait alors répondu Téhéran, qui n'entretient plus de relations diplomatiques avec Washington depuis plus de 40 ans. 

«Vous avez bloqué les exportations de pétrole de l'Iran, vous avez stoppé les transactions bancaires de l'Iran [...] votre offre d'aide est le plus gros mensonge de l'histoire», a encore déclaré le président iranien ce 23 mars. 

«Le seul remède : défiez les sanctions massives des USA», a enjoint de son côté en anglais sur Twitter le ministre des Affaires étrangères iranien Mohammad Javad Zarif. Le chef de la diplomatie a présenté cet appel comme un «impératif moral et pragmatique».

Vous êtes capables d'introduire dans notre pays un médicament qui maintiendra le virus et empêchera son éradication

«Aujourd'hui, l'Amérique est notre ennemi le plus féroce et le plus vicieux», a déclaré pour sa part le guide suprême iranien Ali Khamenei qui a lui aussi balayé le 22 mars dans un discours télévisé les propositions d'aide humanitaire américaine dans le pays. 

«Les dirigeants américains sont à la fois menteurs, manipulateurs, impudents, et avides [...] Ce sont des charlatans», a ajouté le numéro un iranien. Il a par ailleurs enjoint les Américains a garder leur traitement. 

Les propositions américaines «de nous aider avec des médicaments et des traitements, à condition qu'on [le leur] demande [sont] étranges», a encore dit le guide, notant que les Etats-Unis souffraient, «de l'aveu des responsables américains eux-mêmes», d'«une horrible pénurie, dans le domaine du matériel de prévention contre la maladie mais aussi des médicaments.»

«Si vous avez quelque chose, utilisez-le pour vous-mêmes», a-t-il lancé comme s'il s'adressait à Washington.

«Deuxièmement, vous, les Américains, êtes accusés d'avoir produit ce virus. Je ne sais pas à quel point cette accusation est vraie, mais quand une telle accusation existe, pourquoi les gens raisonnables devraient-ils vous faire confiance ?», a-t-il poursuivi.

«Vous êtes capables d'introduire dans notre pays un médicament qui maintiendra le virus et empêchera son éradication», a encore accusé l'ayatollah. 

Le 22 mars, le gouvernement a ordonné que les centres commerciaux ferment à Téhéran, où seules les pharmacies et les boutiques de produits de première nécessité sont ouvertes. Les autorités ont enjoint les Iraniens à éviter les déplacements pour le nouvel an persan (20 mars), mais selon la police, ces instructions ont peu été suivies par la population. 

En Iran, l'épidémie fait rage et n'épargne pas les élites : un nombre significatif de dignitaires ou anciens dignitaires du clergé, de l'armée, du gouvernement, des parlementaires ou de la diplomatie ont été frappés par le Covid-19 et plusieurs en sont morts. Au total, selon un bilan officiel du 23 mars, plus de 1 800 personnes sont décédées du coronavirus en Iran. Plus de 20 000 cas ont été confirmés.

Une des raisons avancées pour expliquer la contamination des parlementaires est la campagne pour les élections législatives dans le pays dont le premier tour s'est déroulé le 21 février. Nombres de candidats en campagne sont alors allés au contact de la population. 

Les sanctions économiques américaines qui frappent l'Iran depuis la Révolution islamique de 1979 et le renversement du Shah ont un lourd impact dans plusieurs domaines dont celui de la Santé. Elles limitent en effet fortement l'accès des Iraniens à certains médicaments ou traitements vitaux.