Ce 13 janvier, cinq jour après avoir annoncé conjointement avec la Turquie l’entrée en vigueur d’un cessez-le feu en Libye effectif au 12 janvier, la Russie accueille les deux principaux protagonistes du conflit : le chef du gouvernement reconnu par l'ONU (GNA), Fayez al-Sarraj, et l'homme fort de l'Est, le maréchal Khalifa Haftar à la tête des forces de l'Armée nationale libyenne (ANL). Les deux hommes dont les troupes s’opposent depuis avril dernier aux portes de la capitale Tripoli doivent apposer leur signature pour officialiser la fin des hostilités.
«Aujourd'hui, à Moscou, sous l'égide des ministres russes et turcs [...] des contacts inter-libyens sont prévus. Il est prévu que [Fayez al-] Sarraj, [Khalifa] Haftar et les représentants d'autres parties libyennes participent», a précisé la diplomatie russe aux agences russes. «Dans le contexte des initiatives russe et turque qui ont été annoncées à l’issue du sommet d’Istanbul, des négociations entre responsables libyens sous l’égide des chefs des diplomaties et de la Défense russes et turques auront lieu aujourd’hui à Moscou», a souligné le ministère russe des Affaires étrangères à l’agence russe TASS.
Les ministres turcs des Affaires étrangères et de la Défense, Mevlut Cavusoglu et Hulusi Akar ont également fait le déplacement et seront reçus par leurs homologues russes, Serguei Lavrov et Sergueï Choïgou.
Dans l'après-midi, le Haut Conseil d'Etat de Libye, basé à Tripoli, a annoncé que Fayez al-Sarraj avait refusé de rencontrer Khalifa Haftar.
Ankara et Moscou, médiateurs incontournables de la crise libyenne
La signature de ce cessez-le-feu intervient avant la tenue courant janvier à Berlin d’une conférence internationale sur la Libye sous l’égide de l’ONU, annoncée par le gouvernement allemand. Hôte de cet événement diplomatique, la chancelière allemande Angela Merkel s’est déplacée le 11 janvier à Moscou pour évoquer avec Vladimir Poutine les futurs pourparlers censés accélérer la résolution de la crise.
«Je compte vraiment sur le fait que dans quelques heures, [...] comme nous l'avons demandé avec le président turc [Recep Tayyip] Erdogan, les parties au conflit libyen cesseront le feu», avait alors déclaré le président russe à l'issue d’une conférence de presse, avant d’insister : «Il est important de mettre fin enfin à la confrontation armée.» Côté allemand, la chancelière avait salué les efforts russo-turcs.
«Nous espérons que les efforts conjoints de la Russie et de la Turquie aboutiront à un succès, et nous enverrons bientôt des invitations à une conférence [de paix] à Berlin sous l’égide de l’ONU», avait alors annoncé Angela Merkel, afin que la Libye puisse redevenir un pays «souverain et pacifié». Vladimir Poutine a, en retour, exprimé qu’une telle conférence serait un «pas dans une bonne direction».
Le chef de la diplomatie turque, Mevlüt Cavusoglu, avait pour sa part appelé Moscou à «convaincre» le chef militaire et homme fort de l’est de la Libye. Ankara a déployé des militaires sur le territoire libyen depuis début janvier pour soutenir le GNA.
En proie au chaos depuis l’intervention de l’OTAN en 2011, qui s'est soldée par la chute et la mort de l'ancien dirigeant Mouammar Kadhafi, la Libye est minée depuis 2014 par une guerre fratricide entre deux hommes, Fayez al-Sarraj et le maréchal Khalifa Haftar. Conséquence de cette guerre civile, le territoire libyen est divisé en deux : à l’ouest, sur une bande territoriale au sein de laquelle se trouve Tripoli, s'étend le pouvoir du GNA de Sarraj. Si cette entité politique, basée dans la capitale, est reconnue par la communauté internationale, elle parvient difficilement à imposer son autorité sur ses propres milices.
En face, le maréchal Haftar, qui dit tirer sa légitimité du Parlement de Tobrouk, également reconnu par la communauté internationale, contrôle la totalité de la Cyrénaïque (est du pays), ainsi qu’une large partie de la Tripolitaine (ouest) et du Fezzan (sud-ouest).
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