Mercredi 8 janvier
Le parquet de Tokyo a immédiatement réagi aux violentes critiques émises par Carlos Ghosn contre la justice japonaise lors de sa conférence de presse au Liban, les jugeant «unilatérales» et «inacceptables».
«Les allégations du prévenu Ghosn font abstraction de sa propre conduite et ses critiques unilatérales du système de justice pénale du Japon sont totalement inacceptables», ont écrit les procureurs dans un communiqué mis en ligne, une démarche rare de la part du parquet de Tokyo.
Carlos Ghosn se présentera à la justice française si «elle le demande». Quelques minutes plus tôt, en réponse à une question sur ses attentes vis-à-vis du gouvernement français, il a ainsi déclaré : «Rien du tout […]. Quand le président de la République [Emmanuel Macron] dit : "présomption d’innocence", je le crois.»
Carlos Ghosn a assuré qu'il considérait que le Premier ministre japonais Shinzo Abe n'était «pas impliqué» dans son arrestation, qu'il a qualifiée de «coup monté», lors de sa première conférence de presse à Beyrouth depuis sa fuite du Japon.
«Je ne crois pas que [les responsables de] haut niveau étaient impliqués», a-t-il dit aux journalistes. «Si vous parlez d'Abe-san (suffixe honorifique japonais), je ne crois pas qu'Abe-san était impliqué», a-t-il ajouté.
Alors que la journaliste de RT France, Samantha Ramsamy lui demande s'il estime avoir été «lâché» par les autorités françaises, Carlos Ghosn répond : «Je ne me prononce pas pour l’instant. J’espère que ce n’est pas le cas. Je suis un citoyen français comme les autres. Je ne demande pas à être au-dessus de qui que ce soit mais je ne souhaite pas [non plus] être en dessous de qui que ce soit.»
Carlos Ghosn revient sur l'absence de plusieurs journalistes japonais qui n'ont pas été accrédités à la conférence de presse : «Je ne discrimine pas les médias japonais. [...]. Parler aux outils de propagande du parquet [de Tokyo], ce n'est pas utile pour moi.»
«Je ne me considère pas comme un prisonnier au Liban. Je préfère de loin cette prison à celle où j’étais avant», répond Carlos Ghosn à un journaliste qui l'interrogeait sur un éventuel retour en France.
Carlos Ghosn répond à présent aux questions des journalistes.
«J'aime le Japon, pourquoi me récompense-t-il avec tant de cruauté», s'interroge-t-il après avoir rappelé son attachement pour ce pays. Et de poursuivre : «J’ai été dénigré par la presse japonaise, qualifié de dictateur froid et cupide.»
Carlos Ghosn martèle que l'affaire dans laquelle il est impliqué est uniquement politique : «Je vous le dis, c’est politique. On a essayé de présenter cette affaire comme une affaire banale, [on m'a présenté comme] quelqu’un qui a été trop loin mais ce n’est pas le cas. Je suis innocent de toute les accusations et je peux le prouver car je possède beaucoup de documents et d’autres restent à venir.»
Accusé de financement suspect de deux soirées organisées au château de Versailles en 2014 et 2016, Carlos Ghosn nie en bloc, documents à l’appui.
Carlos Ghosn rejette les accusations de malversations : «Mes comptes bancaires ont tous été contrôlés. S’il y avait le moindre versement suspect, cela serait en première page des journaux japonais.»
Carlos Ghosn accuse plusieurs personnalités issues du groupe Nissan d’être à l’origine du complot fomenté à son encontre : Hitoshi Kawaguchi, ancien vice-président chargé des affaires publiques, Hidetoshi Imazu, ancien auditeur statutaire, et Masakazu Toyoda, directeur du comité de nomination.
«Masakazu Toyoda, un des membres du conseil d'administration, avait des liens avec les autorités», dénonce-t-il.
«Cette affaire trouve son origine au moment du début du déclin des performances de Nissan au début de 2017», relève-t-il. «Certains de nos amis japonais pensaient que la seule façon de se débarrasser de l’influence de Renault sur Nissan était de se débarrasser de moi [...] Et c'est ce qui se passe aujourd'hui.»
«J’ai subi une campagne orchestrée par une poignée de personnes […]. Ce sont des responsables de Nissan, du ministère public japonais qui sont à l’origine de mon calvaire», dénonce-t-il.
«Les accusations portées contre moi sont fausses», assure-t-il.
Après avoir fustigé le système judiciaire japonais, Carlos Ghosn précise que son intervention vise à rétablir la «vérité» : «Il était très facile de me critiquer pendant que j’étais en détention. Mais aujourd’hui, je peux présenter des preuves [de mon innocence].»
En préambule de son intervention, Carlos Ghosn a évoqué son «arrestation brutale». «Il est impossible d’exprimer la profondeur de ce manque [de liberté]», a-t-il déclaré.
Une centaine de journalistes ont été accrédités pour prendre part à cette conférence de presse.
Le début de la conférence de presse de Carlos Ghosn est prévu à 14h dans les locaux du syndicat de la presse à Beyrouth. Depuis le début de l'affaire, l'ancien patron de Renault-Nissan estime que la justice japonaise a fait preuve de partialité à son encontre. Il pourrait, lors de cette conférence, dévoiler des preuves démontrant l'existence d'un complot à son encontre.
L'ancien capitaine d'industrie du groupe automobile Renault-Nissan, Carlos Ghosn, tient une conférence de presse à 13 heures depuis Beyrouth au Liban ce 8 janvier, le pays qui l'a vu naître. C'est là qu'il s'est échappé après avoir fui le Japon le 30 décembre où il est poursuivi depuis novembre 2018 pour quatre chefs d'inculpation dont deux pour abus de confiance aggravée.
Le célèbre patron en cavale estime qu'il fait l'objet d'un complot industriel et judiciaire. Il a produit un communiqué auprès de l'AFP au terme de sa fuite rocambolesque durant laquelle il aurait notamment voyagé dans une malle : «Je suis à présent au Liban. Je ne suis plus l'otage d'un système judiciaire japonais partial où prévaut la présomption de culpabilité. Je n'ai pas fui la justice, je me suis libéré de l'injustice.» Selon cette même source, il est à présent en compagnie de son épouse, Carole Ghosn.
RT France s'est rendu au Liban pour recueillir son témoignage relatif à cette affaire retentissante à l'occasion d'une conférence de presse ce 8 janvier.
Lire aussi : La femme de Carlos Ghosn visée par un mandat d'arrêt japonais pour faux témoignage