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La police nigériane a secouru 300 enfants ayant subi viols et torture dans une école coranique

Les enfants étaient torturés par leurs professeurs dans une école coranique qui était censé fonctionner comme une maison de correction. La pauvreté endémique et la menace djihadiste font de l'éducation un enjeu majeur pour la stabilité du pays.

La police nigériane a secouru, ce 27 septembre, plus de 300 enfants, dont des mineurs à partir de 9 ans qui ont été séquestrés dans une école coranique. Les élèves, de diverses nationalités, ont été victimes de violences, et, peut-être, de viols, de la part du corps professoral. Les faits ont été constatés à Kaduna, dans le nord du pays, à proximité d'Abuja, la capitale.

Nous avons trouvé une centaine d'étudiants […] enchaînés dans une petite pièce, dans le but de les corriger et de les responsabiliser

L'établissement fonctionnait comme une maison de correction destinée aux petits délinquants et enfants turbulents. Il devait fournir un enseignement religieux et des règles de vie strictes. Pourtant, les méthodes des professeurs tenaient davantage de l'horreur que du redressement. Le porte-parole de l'Etat de Kaduna, Yakubu Sabo, a précisé : «Nous avons trouvé une centaine d'étudiants, […] enchaînés dans une petite pièce, dans le but de les corriger et de les responsabiliser.» Les autorités nigérianes ont également retrouvé une «chambre de torture» ou les élèves ayant commis des délits ont été battus et flagellés par leurs enseignants.

Les parents n'étaient pas informés des conditions de vie et de traitement imposées par l'école. Ils n'avaient que le droit de leurs apporter un peu de nourriture et de les voir une fois par mois, sans pouvoir entrer à l'intérieur de l'école. «Ils n'étaient pas autorisés à entrer dans la maison pour voir ce qui se passait, les enfants étaient amenés à l'extérieur pour les rencontrer un bref instant», selon Yakubu Sabo. Des voisins intrigués ont donné l'alerte. Le propriétaire de l'établissement ouvert depuis une dizaine d'années et ses six assistants ont été arrêtés par la police.

L'enseignement, problème majeur au Nigéria

Le Nigéria a connu, depuis son indépendance en 1960, un sous-investissement chronique en terme d'enseignement, entraînant un faible nombre d'écoles en fonction. Dans les provinces pauvres du nord du pays, le trafic d'êtres humains a été très important jusqu'à aujourd'hui, et les enfants ont quitté leurs villages par camions entiers. Dans ces milieux, la drogue est apparu comme une constante majeure de la vie de ces enfants livrés à eux-mêmes.

Le conflit qu'a causé la présence du groupe djihadiste Boko Haram n'a pas contribué à l'amélioration de l'enseignement des enfants du nord du Nigéria. Le groupe, très présent depuis 2013, a pris en mars 2015 le nom d'Etat islamique en Afrique de l'ouest (EIAO), à la suite de son allégeance au calife de Daech Abou Bakr al-Baghdadi.

Les massacres perpétrés par Boko Haram et le caractère sanguinaire de ses chefs ont profondément déstabilisé la région. L'un de ses dirigeants, Aboubakar Shekau, a affirmé dans une vidéo en 2016 : «ô peuple du Nigéria, vous n'avez pas encore de répit.» Dernièrement, le 25 septembre, l'ONG Action contre la faim (ACF) a annoncé qu'un humanitaire avait été exécuté par le groupe terroriste. 

Les actions de Boko Haram ont entraîné un véritable recul de l'Etat dans la région, qui a également été accompagné par une menace de famine très forte au niveau infantile. En novembre 2016, l'ONU a tiré la sonnette d'alarme sur la situation humanitaire catastrophique dans le nord du Nigéria. L'Agence des Nations-Unies pour les réfugiés (UNHCR) parle de plus de «3,5 millions de personnes […] confrontées à l’insécurité alimentaire dans le bassin du Lac Tchad».

L'enseignement, arme contre Boko Haram

Le groupe islamiste a été très conscient des enjeux liés à l'instruction des enfants au Nigéria. Selon l'UNICEF, de 2009 à 2018, Boko Haram a assassiné plus de 2300 enseignants et détruit plus de 1400 écoles. Ces chiffres ont été illustrés en 2014 par l'enlèvement de plus de 276 lycéennes à Chibok, au nord-est du pays. 

Face à cette volonté délibérée de maintenir un bas niveau d'instruction dans le pays, le partenariat mondial pour l'éducation s'est concentré sur l'instruction des filles en particulier qui ont été les premières victimes des actions des terroristes. Dans le nord du pays, la plateforme de financement a avancé le chiffre de plus de deux tiers des enfants illettrés. 100 millions de dollars ont été débloqués entre 2015 et 2019 en ce sens.

En mars 2019 le gouvernement a également pris des mesures draconiennes concernant le refus des parents de mettre leurs enfants à l'école. Ainsi, les pays qui n'ont pas encouragé activement la scolarisation des enfants ont vu fondre leurs budgets alloués à l'enseignement. Le gouvernement a injecté plus de 560 milliards de francs CFA (800 millions d'euros). Dans un contexte de faiblesse de l'Etat, de l'armée face aux djihadistes et d'accusation de corruption contre le président Muhammadu Buhari, ces initiatives satisfairont-t-elles les attentes?

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