Vert blanc rouge. A Alger, comme dans tout le pays, le drapeau algérien est affiché aux balcons, sur les maillots, les bandeaux, les joues des supporters et des contestataires. On ne saurait les distinguer car la plupart tiennent les mêmes discours. «On va gagner» et «ils vont tous dégager» sont les mantras répétés à souhaits par les fans de football et les manifestants du vendredi. Car en Algérie la politique n'est jamais bien loin du football.
Tout le pays retient son souffle. Les plus excités ont commencé à défiler la veille, drapeaux accrochés aux voitures, klaxons toute la nuit, troublant le sommeil des habitants du centre-ville.
Ils entonnent des chants des supporters mais scandent également des slogans du hirak, le mouvement de protestation né le 22 février et dont les manifestations se sont déroulées majoritairement dans une ambiance festive. Foot et politique se mélangent dans ce pays en pleine renaissance dans ces deux domaines.
Le football en Algérie est un sport très populaire. Partout, les enfants et les jeunes le pratiquent, quitte à bricoler, dans les quartiers les plus pauvres, un ballon avec de la paille et du papier journal.
Depuis toujours, la contestation politique s'exprime dans les stades, la foule des supporters défiant les autorités dans les gradins et ce même dans les moments où toute opposition politique était muselée par le pouvoir en place. Le mouvement du 22 février a d'ailleurs été porté par ces supporters. Le chant La Casa del Mouradia dont ont parlé les médias du monde entier, est devenu l'hymne de la contestation aux premiers jours de la mobilisation. Le titre a été inspiré par la série La casa de papel sur Netflix, et la Mouradia est le nom du quartier du siège de la présidence à Alger. Cette chanson décrit la tristesse que procurait à la jeunesse algérienne le système politique algérien des années 2000.
Le président par intérim Abdelkader Bensalah qui devait assurer la transition depuis la démission d'Abdelaziz Bouteflika le 2 avril et jusqu'au 9 juillet est maintenu au pouvoir, sans légitimité constitutionnelle selon ses opposants. Sa présence au Caire auprès des joueurs de l'équipe nationale fait grincer des dents le mouvement de contestation.
Si l'Algérie gagne la coupe d'Afrique, il y a fort à parier que les slogans politiques invitant à changer de système se mêleront aux célèbres «One two three, viva l'Algérie».
Meriem Laribi