«L'annexion de la Crimée par la Russie est illégale. La France le répète à l'occasion de la visite officielle du président Zelensky» : c'est le message publié par le compte Twitter en anglais de la diplomatie française le 17 juin, jour de la visite du chef d'Etat ukrainien à Paris. Le tweet s'accompagne d'une vidéo, dans laquelle le Quai d'Orsay déclare notamment : «La communauté internationale, l'Union européenne et la France continuent à accorder une grande importance à la restauration totale de la souveraineté de l'Ukraine et de son intégrité territoriale.»
La diplomatie française répétait, ici, la ligne constante de Paris concernant le rattachement à la Russie de la Crimée à l'issue d'un référendum en mars 2014. «La France ne reconnaîtra pas l'annexion de la Crimée», déclarait par exemple en juin 2018 le président français Emmanuel Macron.
Moscou a profité de cette occasion pour renvoyer la France à un cas diplomatique méconnu la concernant : celui de Mayotte. «Le président français Macron aurait dû discuter à son homologue ukrainien Zelensky de Mayotte, qui est devenu le 101e département français après un référendum en 2009 au lieu de mentionner la supposée «annexion illégale de la Crimée par la Russie», a tweeté le 18 juin le ministère russe des Affaires étrangères.
Mayotte, une «Crimée» française ?
Mayotte est un département français revendiqué par les Comores et dont l'appartenance à la France est contestée par certains pays.
En 1974, conformément au principe du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, la France organise un référendum sur l'indépendance des Comores. 96% des voix sont en faveur de celle-ci. Mais les quatre îles qui forment alors les Comores ne vont pas accéder à l'indépendance : comme le rappelle France Info, le président Giscard d'Estaing, «pressé notamment par la marine française qui ne souhaite pas perdre ce point d’appui, [...] décide de prendre en compte le résultat du référendum île par île». Or, les électeurs de Mayotte, peuplée de Mahorais se sentant culturellement différents des habitants des trois autres îles, se sont prononcés contre l'indépendance.
Ainsi, lorsque les Comores proclament leur indépendance le 6 juillet 1975, le gouvernement français se déclare quelques jours plus tard «disposé à entamer avec les nouvelles autorités les pourparlers concernant les transferts de responsabilités»... mais ajoute : «S'agissant de l'île de Mayotte, le gouvernement tiendra compte de la volonté ainsi manifestée.»
Les autorités françaises décident donc de mettre en place un nouveau référendum, concernant l'indépendance ou le rattachement à la France de Mayotte. La France va jusqu'à utiliser son droit de veto au Conseil de Sécurité de l'ONU, en février 1976, pour repousser un projet de résolution lui demandant de renoncer à ce nouveau référendum. Organisé en 1976, celui-ci confirme à plus de 90% la volonté de cette île de rester française.
La France, rappelle l'AFP, sera plus tard énergiquement «condamnée a l'ONU en raison de sa présence a Mayotte et sommée de se retirer de l'île», «partie intégrante de la république indépendante des Comores». Ainsi, dans sa résolution du 6 décembre 1994, l'Assemblée générale de l'ONU demande le respect de l’unité nationale et de l’intégrité territoriale de l’archipel, faisant valoir que les frontières héritées de la colonisation étaient intangibles.
Enfin, en mars 2011, Mayotte est devenue le 101e département français après un référendum organisé en mars 2009. Les autorités comoriennes revendiquent toujours la souveraineté de Mayotte.
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