Invité de l'Organisation internationale du travail (OIT) au Palais des Nations de l’ONU à Genève le 11 juin, Emmanuel Macron y a tenu un discours fort en promesses, sur fond de lourdes menaces. «Nous sommes à l'orée d'un temps de guerre», a ainsi prévenu le chef de l'Etat français, jugeant que la «crise profonde que nous sommes en train de traverser» pouvait non seulement conduire «à la désagrégation de nos démocraties», mais en plus, à un conflit.
«Je pense que le chaos est là», a déclaré Emmanuel Macron, expliquant que cette situation résultait selon lui du «travestissement» du libéralisme et de l'économie sociale de marché en «un modèle néolibéral et d'un capitalisme d'accumulation». L'ancien banquier d'affaires s'est alors lancé dans une critique féroce du modèle néolibéral, soulignant «l'autre face de la mondialisation» qui rime selon lui avec délocalisation, dégradation des conditions de vies, de travail ou encore dumping social et environnemental.
«La rente peut-elle se justifier dans ces conditions ? Lorsque la financiarisation de nos économies conduit à ces résultats ?», s'est interrogé l'ancien ministre socialiste, se désolant comme son prédécesseur, François Hollande, que le monde n'ait pas su tirer les conséquences de la crise de 2008.
Une crise qui nourrit les extrêmes
Emmanuel Macron est même allé jusqu'à regretter les «ajustements brutaux inédits depuis la deuxième guerre mondiale» qui ont été menés dans les pays du Sud de l'Europe, «avec des reculs qui ne s'étaient jamais connus en temps de paix», alors que dans le même temps, «l'accumulation des richesses dans certains lieux, et chez certains s'est accélérée».
Nous avons peut-être parfois construit des bonnes réponses trop loin de nos concitoyens
«Quelque chose ne fonctionne plus dans l'organisation de ce capitalisme, quand il profite de plus en plus à quelques uns et conduit à des déséquilibres territoriaux qui fracturent toutes nos démocraties», s'est-il encore inquiété.
Désolé de voir une économie de marché «de moins en moins sociale», le président français a noté de façon assez étonnante que cette crise pouvait «paraître douce» parce que les victimes n'avaient «pas de porte-voix». «Ce qui fait douter nos concitoyens, c'est qu'ils n'ont plus leur part de progrès», a-t-il poursuivi, soulignant que face à cet échec du «multilatéralisme», le peuple se tournait vers «les extrêmes, la démagogie qui affaiblit la démocratie».
Soucieux de «remettre l'homme et l'humanité au cœur», Emmanuel Macron a estimé : «Nous avons peut-être parfois construit des bonnes réponses trop loin de nos concitoyens.»
Il a promis de «changer en profondeur le modèle productif», et de joindre les actes à la parole lorsqu'il serait face au Fonds monétaire international (FMI) ou au Conseil européen. «Je ne veux plus qu'en Europe, le sujet de l'ajustement économique et financier de la dette prévale sur les droits sociaux. Je ne veux plus d'accords commerciaux internationaux qui alimentent le dumping social et environnemental», a assuré le chef d'Etat.
Avant que ses alliés européens ne se réjouissent trop vite, rappelons que le 8 juin, Emmanuel Macron expliquait vouloir faire adopter «dans les meilleurs délais» le controversé traité de libre-échange entre le Canada et l'UE, le CETA. Les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent.