Le Mali est une nouvelle fois endeuillé : au moins 95 habitants d’un village dogon de Sobane-Kou, dans le centre du Mali, ont été tués par des hommes armés dans la nuit du 9 au 10 juin selon un bilan provisoire du gouvernement malien. Dix-neuf personnes sont en outre portées disparues. Si les autorités soupçonnent «des terroristes» d'être à l'origine de l'attaque, aucune revendication n'a été enregistrée.
«C'est un choc, une tragédie», a confié à l'AFP le chef de la mission de l'ONU au Mali (Minusma), Mahamat Saleh Annadif, dans les couloirs des Nations unies à New York, alors que se répandait la nouvelle de cette nouvelle tuerie. Elle fait suite au massacre, le 23 mars, de quelque 160 Peuls par de présumés chasseurs dogons dans cette région, proche de la frontière avec le Burkina Faso, devenue la plus violente du pays.
Depuis l'apparition en 2015 dans le centre du groupe djihadiste du prédicateur Amadou Koufa, recrutant prioritairement parmi les Peuls, traditionnellement éleveurs, les affrontements se multiplient entre cette communauté et les ethnies bambara et dogon, pratiquant essentiellement l'agriculture, qui ont créé leurs «groupes d'autodéfense».
«C'est un village dogon qui a été quasiment rasé», a confié une source de sécurité malienne sur place. Selon un rescapé, Amadou Togo, les assaillants étaient «une cinquantaine d'hommes lourdement armés, venus à bord de motos et de pick-up». «Ils ont d'abord encerclé le hameau avant de lancer l'assaut, tous ceux qui ont voulu fuir ont été abattus», a-t-il raconté à l'AFP.
L'association de chasseurs dogons Dan Nan Ambassagou, dont le gouvernement avait annoncé la dissolution le 24 mars, au lendemain du massacre d'Ogossagou, a condamné un «acte terroriste et génocidaire intolérable». Dans un communiqué, le mouvement «considère cette attaque comme une déclaration de guerre et en prend acte». Le groupe, qui avait démenti en mars toute implication dans la tuerie d'Ogossagou mais rejeté sa dissolution et refusé de «déposer les armes», réitère «sa disponibilité» aux populations pour «assurer davantage leur sécurité» face aux carences de l'Etat et de la communauté internationale.
Des violences intercommunautaires qui t’intensifient
Le nord du Mali était tombé en mars-avril 2012 sous la coupe de groupes djihadistes, en grande partie dispersés par une intervention militaire lancée en janvier 2013 à l'initiative de la France, qui se poursuit. Mais des zones entières échappent au contrôle des forces maliennes, françaises et de l'ONU, malgré la signature en 2015 d'un accord de paix censé isoler définitivement les djihadistes, dont l'application accumule les retards.
Depuis 2015, ces violences se sont propagées du nord vers le centre, voire parfois le sud du Mali. Elles se mêlent très souvent à des conflits intercommunautaires, un phénomène que connaissent également le Burkina Faso et le Niger voisins.