Un peu plus de deux mois après s'être autoproclamé président par intérim du Venezuela lors d'un meeting devant ses partisans à Caracas, Juan Guaido a été déchu de son poste de président du Parlement ce 28 mars. Les autorités vénézuéliennes ont en outre annoncé que l'homme politique, accusé de corruption présumée, ne pourrait pas exercer de fonction élective durant 15 ans.
91 voyages et des fonds étrangers douteux ?
Chargé de veiller à la transparence de l'administration, le Contrôleur général de la République vénézuélienne, Elvis Amoroso, a fait savoir que l'opposant, soutenu par Washington, n'avait pas justifié dans ses déclarations de patrimoine des dépenses réalisées au Venezuela et à l'étranger, avec des fonds provenant d'autres pays.
«Il a réalisé plus de 91 voyages hors du territoire pour un coût supérieur à 310 millions de bolivars [environ 94 000 dollars selon le taux actuel], sans justifier l'origine de ces fonds», a rapporté le Contrôleur.
Juan Guaido a pour sa part fait savoir qu'il rejetait la sanction le visant. Il a estimé que le Contrôleur était illégitime car il n'avait pas été nommé par le Parlement, sous contrôle de l'opposition.
Après s'être auto-attribué la fonction de «président par intérim» quelques jours après l'investiture de Nicolas Maduro, réélu pour un second mandat à la tête du Venezuela, Juan Guaido avait bénéficié de l'appui immédiat de Washington et du soutien progressif d'autres pays pour organiser une transition politique dans son pays.
Le 22 février, en dépit d’une interdiction judiciaire de sortir du territoire, il avait été reçu en chef d’Etat à Bogota, Rio, Buenos Aires, Lima et Quito, pays alliés des Etats-Unis. Le 4 mars, il était ensuite retourné au Venezuela.
Un opposant qui ne fait pas l'unanimité
Depuis l'annonce de l'homme politique fin janvier, les manifestations de soutien et d'opposition à Nicolas Maduro se succèdent au Venezuela. Mais les positions radicales de Juan Guaido sont loin de faire l'unanimité dans un pays dont l'histoire récente a été marquée par des tentatives d'ingérence des Etats-Unis, qui avaient notamment soutenu une tentative de coup d'Etat contre Hugo Chavez en 2002.
L'opposant avait notamment expliqué, le 8 février, qu'une intervention militaire des Etats-Unis dans son pays, avec pour objectif de contraindre Nicolas Maduro au départ, n'était pas à exclure. «Nous ferons tout ce qui est nécessaire. C'est une question évidemment très polémique, mais en faisant usage de notre souveraineté, de l'exercice de nos prérogatives, nous ferons le nécessaire», avait répondu Juan Guaido à la question de l'utilisation de ses compétences légales pour autoriser une éventuelle intervention militaire contre Nicolas Maduro.
Un positionnement qui fait dire à certains observateurs, dont l'animateur du site Le Grand soir Maxime Vivas, qui s'exprimait le 28 mars sur RT France : «Dans n'importe quel pays du monde, Juan Guaido serait en prison.»
«Actuellement, il demande que les soldats russes partent. Il dit que c'est une violation de la Constitution. Et en même temps, il demande l'intervention de l'armée étasunienne sur son propre territoire, contre son propre pays. Je pense qu'il n'y a pas un seul pays au monde où des choses pareilles seraient tolérées», affirme ainsi Maxime Vivas.
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Louis Maréchal