La Serbie commémore ce 24 mars le 20e anniversaire des frappes aériennes de l'OTAN qui avaient contraint en 1999 Belgrade à retirer ses troupes du Kosovo.
Des cérémonies sont organisées dans plusieurs villes du pays, notamment à Belgrade. La principale commémoration, à laquelle doivent participer le président serbe Aleksandar Vucic et le Premier ministre Ana Brnabic, est prévue à 20h à Nis, ville du sud de la Serbie. Symboliquement, en référence aux bombardements occidentaux de 1999, les sirènes d'alerte de défense anti-aérienne retentiront.
Aleksandar Vucic a déclaré le 23 mars que la Serbie n'avait pas peur d'appeler «les choses par leur juste nom», soulignant que les frappes étaient une «agression de l'OTAN» contre son pays. «Nous avons besoin d'une bonne et décente relation avec l'OTAN, afin de ne plus jamais conduire la Serbie dans une telle position, mais il est également important de ne jamais oublier les crimes qu'ils ont commis contre notre peuple et nos enfants», a-t-il plaidé.
Le même jour, le ministre serbe de la Défense, Aleksandar Vulin, a souligné que la Serbie avait choisi la neutralité militaire. «Nous ne deviendront pas un pays membre de l'OTAN même si on reste le dernier pays d'Europe qui n'est pas membre de l'Alliance atlantique», a-t-il assuré.
Le 12 mars dernier, le ministre serbe de l’Innovation et du Développement technologique, Nenad Popovic, avait également rappelé la volonté de Belgrade de préserver son indépendance. «La Serbie reste fermement sur ses positions de neutralité militaire : notre pays ne sera jamais membre de l’OTAN. 99% des citoyens de la République serbe expriment clairement cette position. Et nous nous tenons à la neutralité militaire», avait-il alors martelé.
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Le Kosovo exprime sa «gratitude» à l'OTAN
Il y a vingt ans, le 24 mars 1999, l'OTAN lançait une campagne de bombardements aériens contre la Yougoslavie, composée alors encore de la Serbie et du Monténégro, afin d'intervenir dans le conflit à caractère ethnique du Kosovo qui a fait plus de 13 000 morts, en grande majorité albanais, de 1998 à 1999.
Durant la campagne de bombardements contre la Serbie qui a duré 11 semaines – du 24 mars au 10 juin 1999 – l'Alliance atlantique a visé des dizaines de cibles militaires, ainsi que des infrastructures civiles telles que des ponts, des intersections ferroviaires ou le réseau électrique. Du fait des erreurs de frappes, l'opération a fait de nombreuses victimes, sans, pour autant qu'un bilan ne soit officiellement établi. La fourchette de l'estimation irait de 500 morts selon l'ONG Human Rights Watch à 2 500 selon les autorités serbes.
Le 10 juin 1999, cédant face à la supériorité militaire de l'OTAN, le dirigeant serbe Slobodan Milosevic avait ordonné à ses forces de se retirer du Kosovo, une province placée le mois suivant sous administration de l'ONU. Une telle intervention, sans l'aval du Conseil de sécurité des Nations unies, constituait alors une première contre un Etat souverain en 50 ans d'existence de l'Alliance atlantique.
Avec une toute autre vision des événements, le Premier ministre du Kosovo, Ramush Haradinaj, a de son côté affirmé qu'il s'agissait d'une «intervention» contre «l'action génocidaire [du président serbe de la Yougoslavie Slobodan] Milosevic». «Le peuple du Kosovo réaffirmera toujours sa profonde gratitude [pour cette opération qui a] sauvé des milliers de vies et qui nous a donné la possibilité de vivre en paix et en liberté», a-t-il écrit sur son compte Twitter.
Près d'une décennie après la guerre, le Kosovo avait déclaré en février 2008 son indépendance, soutenu, dans une séquence minutieusement préparée, par les principaux pays occidentaux, en premier lieu desquels les Etats-Unis. Toutefois, cette déclaration a largement divisé la communauté internationale, puisque outre la Serbie, deux membres du Conseil de sécurité, la Russie et la Chine, n'ont pas reconnu cette indépendance et ont donc bloqué l'entrée du Kosovo à l'ONU.
11 ans après son indépendance – toute relative – le Kosovo reste un pays pauvre, plombé par la corruption et sous la tutelle de puissances étrangères. Quant à l'UE, elle ne parvient pas à respecter sa promesse d'intégrer ce petit pays et de stabiliser la région.
Alexandre Keller
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