Taliban et représentants de l'opposition au gouvernement afghan se sont quittés ce 6 février sur un satisfecit à l'issue de deux jours de pourparlers à Moscou en s'accordant sur un communiqué commun.
«Ce fut un grand succès. Nous nous sommes mis d'accord sur de nombreux points et j'espère qu'à l'avenir nous pourrons aller plus loin et enfin parvenir à une solution», a déclaré le chef de la délégation talibane, Sher Mohammad Abbas Stanikzai. L'ex-président afghan Hamid Karzaï s'est également dit satisfait «des résultats de la réunion» et d'être «parvenus à une déclaration très substantielle».
Les 80 membres de partis politiques et de la société civile afghane, où ne figurait aucun membre du gouvernement du président afghan Ashraf Ghani, ont établi en accord avec la dizaine de représentants talibans une déclaration d'intention en neuf points. Outre des engagements à poursuivre «des pourparlers intra-afghans», les deux parties, qui ont voté l'accord à main levée après sa lecture, se sont engagées à respecter de nombreux droits, dont celui des femmes «conformément aux valeurs islamiques».
Plusieurs bémols sont néanmoins à noter, à commencer par l'acception de ces fameux «droits des femmes». «Lorsque vous parlez des droits islamiques, il y a des interprétations différentes. J'ai vécu en Afghanistan à l'époque des Taliban et je sais que leur interprétation des droits islamiques concernant les femmes est différente de celle du gouvernement actuel», a déclaré, après le vote, la présidente de la commission des Femmes, de la société civile et des droits de l'Homme à l'Assemblée. «Mes recommandations durant les réunions plénières étaient d'inscrire que les droits des femmes et de tous les citoyens seront protégés dans le cadre de tout accord futur. Cela a été accepté mais n'a pas été reflété dans la résolution», a-t-elle déclaré. Elle n'a par conséquent pas voté le texte.
Un appel au retrait des forces armées étrangères
Autre point négatif : la déclaration finale ne mentionne pas d'éventuel changement de la Constitution afghane, tel qu'il avait été réclamé par les représentants talibans.
En revanche, le «retrait complet des forces armées étrangères» figure dans la déclaration finale, de même que l'engagement que le territoire afghan «ne pose pas de menace à la communauté internationale» – deux points sur lesquels les Etats-Unis et les Taliban semblent avoir posé les bases d’un accord lors de leurs derniers pourparlers fin janvier à Doha.
Interrogé sur l'existence d'un accord de retrait des forces américaines, Sher Mohammad Abbas Stanikzai a toutefois indiqué qu'«aucun calendrier n'[avait] été fixé» et que ce point était toujours en cours de négociation avec Washington. Les Etats-Unis, qui comptent environ 14 000 militaires en Afghanistan, ont de nouveau confirmé qu'aucune date de retrait n'était pour l'heure envisagée avec exactitude.
Ce premier dialogue intra-afghan du processus de paix en cours s'est tenu en l'absence de représentants du gouvernement, qui n'y ont pas été conviés en dépit d'appels répétés du président Ashraf Ghani à négocier. Visiblement excédé, il avait répliqué en soulignant l'absence de légitimité des participants. «A qui parlent-ils ? Où est leur pouvoir exécutif ?», s'est-il exclamé la veille dans un entretien à la télévision afghane.