L'Allemagne a relancé de manière spectaculaire le débat sur une éventuelle réforme de la composition des membres permanent du Conseil de sécurité des Nations unies. Et Berlin est bien décidé, à travers celle-ci, à mettre à l'épreuve la résolution de Paris dans le projet européen.
«Si nous prenons l'Union européenne au sérieux, l'UE devrait également parler d'une seule voix au sein du Conseil de sécurité des Nations unies [...] A moyen terme, le siège de la France pourrait être transformé en siège de l'UE», a ainsi suggéré le numéro deux du gouvernement allemand, le vice-chancelier Olaf Scholz lors d'un discours sur l'avenir de l'Europe à Berlin, le 28 novembre.
Conscient que Paris pourrait avoir quelques réticences à céder un élément majeur de sa puissance géopolitique – seuls cinq pays disposent d'un fauteuil permanent au Conseil de sécurité (Chine, États-Unis, France, Royaume-Uni, Russie) et du droit de veto qui lui est associé – Berlin a proposé en contrepartie que le poste distinct de chef de la délégation de l'Union européenne auprès des Nations unies revienne de manière permanente à un Français.
Un signe de frictions entre Paris et Berlin ?
Cette proposition est défendue de longue date par l'Allemagne, Angela Merkel ayant déjà plaidé pour que l'Union européenne «parle d'une seule voix» au Conseil de sécurité de l'ONU en juin dernier. Mais son retour au premier plan est aussi lié à l'impatience affichée par Emmanuel Macron à l'égard de l'Allemagne, de plus en plus critiquée pour son manque d'audace dans les propositions de relance du projet européen.
Après avoir appelé de ses vœux la création d'une «vraie armée européenne» début novembre, le président français n'avait pas hésité à exhorter les députés du Bundestag à sortir de «l'immobilisme» et à surmonter les «tabous» pour faire évoluer l'UE, dans un discours offensif à Berlin quelques jours plus tard.
Derrière l'entente entre les deux pays, dont les accents sonnent parfois faux, la proposition de l'Allemagne peut donc se lire comme un réponse cinglante à Paris. Si Emmanuel Macron n'a pas encore réagi, elle a en revanche déjà suscité une réaction de l'ambassadeur de France aux Etats-Unis. Tout aussi cinglante : «C’est juridiquement impossible car contraire à la Charte des Nations unies. La modifier serait politiquement impossible», a-t-il écrit dans un message sur Twitter.
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