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Le président de l’Assemblée nationale algérienne victime d'un «coup d’Etat» ?

A six mois de l’élection présidentielle algérienne, la chambre basse du parlement traverse une crise inédite : son président, Saïd Bouhadja, est poussé vers la sortie par certains députés de la majorité présidentielle.

La chambre basse du Parlement algérien, l’Assemblée populaire nationale (APN), est ces dernières semaines l’épicentre d’une fronde des députés de la majorité présidentielle, qui a provoqué le gel des travaux parlementaires. A l'origine de la bronca, le limogeage, le 23 septembre dernier, de Bachir Slimani, secrétaire général de l’APN. Ce dernier avait refusé de valider des notes de frais de mission jugées excessives émises par le président du parlement, Saïd Bouhadja.  

«Il faut savoir que les frais de mission du président de l’Assemblée sont octroyés par la présidence de la République, et ce, lorsqu’il s’agit d’un déplacement officiel. J’ai été trois fois en France, avec mes propres moyens. Il n’y a pas de frais de mission» s’est défendu Saïd Bouhadja au cours d’un entretien accordé au journal El Watan

Pour les députés de la majorité, le mal est fait et le limogeage de Bachir Slimani ne passe pas. Soutenus dans leurs revendications par le Premier ministre Ahmed Ouyahia et le chef du FLN, l’un des partis composant la majorité présidentielle, 200 députés frondeurs ont bloqué plusieurs heures durant, le 16 octobre, les portes de l’APN, empêchant ainsi Saïd Bouhadja d’y pénétrer.

Cette manœuvre a eu pour effet de tenir Saïd Bouhadja à l'écart de son bureau pendant suffisamment longtemps pour que soit finalement proclamée... la vacance de la présidence de l’Assemblée au cours d’une réunion extraordinaire. Fustigée par la presse proche de l'opposition et des partis d’opposition, qui n'hésitent pas à parler de «coup d'Etat», cette proclamation n'a pour l'instant pas été commentée par l'intéressé lui-même, Saïd Bouhadja demeurant depuis muré dans le silence.

Interrogé par l’hebdomadaire Jeune Afrique, la constitutionnaliste Fatiha Benabbou estime que la proclamation de la vacance de la présidence de l'APN n’a pas de fondement légal : «Personne n’a besoin d’une formation de juriste pour y répondre. Evidemment que cette décision est inconstitutionnelle, puisque le statut du président de l’APN est reconnu par la loi fondamentale. Il y a une disposition expresse qui dit que son mandat est de cinq ans.» Sur le plan constitutionnel, le mandat de Saïd Bouhadja, s’achève en 2022.

Dos au mur, Saïd Bouhadja peut néanmoins compter sur le soutien de la puissante organisation nationale des moudjahidines (anciens combattants) et d’une partie de la population algérienne. En effet, sur les réseaux sociaux, ils sont nombreux à voir en lui, l’homme qui ne veut pas céder face aux «puissants». Habituellement discret, il s’était offert le 11 octobre une sortie dans les rues d’Alger où il avait accepté de prendre plusieurs selfies avec des passants.

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