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Autriche : le ministère de l'Intérieur accusé de vouloir museler les médias qu'il juge «partiaux»

Dans un courriel révélé par la presse, le cabinet du ministre de l'Intérieur a recommandé à ses équipes de limiter au «minimum légal» la communication avec trois publications jugées peu complaisantes, déclenchant les critiques de l'opposition.

Le parti de droite au pouvoir en Autriche, le FPÖ, est actuellement dans la tourmente, accusé par l'opposition de vouloir museler les médias. En cause, un courriel adressé par le porte-parole du ministère autrichien de l'Intérieur Christoph Pölzl à ses équipes, et qui a fuité dans la presse. Dans ce message, il leur recommande de garder leurs distances avec les médias jugés trop critiques de l'action gouvernementale. Avec dans sa ligne de mire, les quotidiens Der Standard et Kurier ainsi que le magazine hebdomadaire Falter, qu'il considère comme«partiaux et négatifs sur le ministère et la police».

«Les faits et les explications ne sont plus pertinents, ils sont simplement ignorés parce que les articles sont de toutes façon négatifs, comme le démontrent de nombreux articles d'un passé récent», écrit Christoph Pölzl dans ce courriel. «Puis-je suggérer de limiter la communication avec ces médias au minimum (légal) et de ne pas leur fournir d’autres avantages, tels que l’accès exclusif», recommande-t-il encore, précisant que des exceptions peuvent être faîtes s'il existe une possibilité d'un reportage «neutre ou positif».

Contacté par Deutsche Welle le 25 septembre, Christoph Pölzl a confirmé l'authenticité du message, mais a nié qu'il contienne des instructions au «caractère obligatoire», les décrivant comme «des suggestions et des commentaires». «De toute évidence, tous les médias ont le droit et même le devoir de jeter un regard critique sur le travail de la police, du ministère de l’Intérieur et du ministre», a-t-il répondu à Deutsche Welle par courrier électronique. «Toutefois, les responsables de la communication ont aussi le droit, à partir des informations qu'ils ont fourni et des reportages qui en ont résulté, de tirer des conclusions sur la qualité [de ces derniers]», a-t-il conclu.

Toute limitation de la liberté de la presse est inacceptable

L'opposition sociale-démocrate, libérale et écologiste est montée au créneau, dénonçant une «muselière pour les médias indépendants» ainsi qu'une tentative d'«orbanisation» de l'Autriche, dans une allusion au dirigeant hongrois Viktor Orban. Le parti libéral Neos a pour sa part demandé à ce que le ministre de l'Intérieur Herbert Kickl soit convoqué par le Parlement, appelant le chancelier conservateur Sebastian Kurz à «tirer des conséquences».

Depuis New York où il participe à l'assemblée générale annuelle des Nations unies, ce dernier a visiblement tenté d'éteindre la polémique, soulignant que «toute limitation de la liberté de la presse [était] inacceptable». «Les partis et les institutions gouvernementales ont un haut degré de responsabilité envers un journalisme libre et indépendant dans le pays», a-t-il soutenu en marge d'un événement de l'ONU, dans des propos rapportés par l'agence de presse DPA.

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