L'espace européen Schengen de libre-circulation des personnes «commence à disparaître» sous la pression de l'immigration. C'est ce qu'a déploré ce 15 juillet le ministre espagnol des Affaires étrangères, le socialiste Josep Borrell, dans un entretien au quotidien espagnol El Pais.
«Malheureusement, Schengen commence à disparaître. Par derrière et en catimini, la France, l'Allemagne et l'Italie ont rétabli les contrôles à leurs frontières à cause de la crise migratoire», s'est inquiété Josep Borrell.
Le ministre fait notamment référence au fait que l'Italie et son ministre de l'Intérieur issu de la Ligue, Matteo Salvini, refusent régulièrement d'accueillir sur leur sol les migrants interceptés au large de leurs côtes, réclamant qu'ils soient accueillis dans d'autres Etats membres de l'Union européenne (UE).
A l'inverse, l'Espagne a accepté, depuis l'arrivée au pouvoir le 1er juin du socialiste Pedro Sanchez, d'accueillir dans ses ports plusieurs bateaux d'ONG refusés par l'Italie, en particulier l'Aquarius mi-juin.
D'une manière plus générale, il est vrai que la ligne dure en matière d'immigration gagne du terrain, poussée par la montée de partis opposés à l'immigration. «Jusqu'ici, la droite dure imposait ses thèses. Le mérite de l'Espagne, c'est d'avoir marqué un tournant dans le débat migratoire avec l'épisode de l'Aquarius», a affirmé Josep Borrell.
Le ministre, ancien président du Parlement européen, croit néanmoins que si l'Italie «opte pour le durcissement de sa politique migratoire, elle peut prendre le chemin de la désintégration de l'Europe». «Le problème migratoire est le plus puissant dissolvant de l'UE. Il peut provoquer une crise plus grave que celle de l'euro», a-t-il estimé. Celle-ci a pourtant fait vaciller l'économie de l'Union au début des années 2010 et a très durement frappé les pays du sud de l'Europe, en particulier l'Espagne.
Le problème migratoire est le plus puissant dissolvant de l'UE
«Une crise économique peut se résoudre avec des ressources financières et des changements institutionnels, mais les problèmes de l'immigration sont plus profonds : ils touchent aux valeurs, aux identités, aux cultures, aux capacités d'assimilation des sociétés», a assuré Josep Borrell. Pour l'heure, force est cependant de constater que tel n'a pas été le cas, l'Union européenne peinant à s'accorder sur la question migratoire.
Selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), 61 557 personnes ont gagné l'Europe depuis le début de l'année. 1 422 sont mortes ou portées disparues en Méditerranée. La Grèce est la première porte d'entrée de ces migrants, suivie par l'Espagne et l'Italie.