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Contre RT, le gouvernement entend s'inspirer du CSA britannique

Le 3 juillet, la ministre de la Culture Françoise Nyssen a cité en exemple l'Ofcom, le CSA britannique, qui est prêt à envisager un retrait de la licence attribuée à RT en cas d'«utilisation illégale de la force par l'Etat russe».

RT semble bel est bien visé par les deux propositions (l'une ordinaire et l'autre organique) de loi pour lutter contre la manipulation de l'information. Le 3 juillet, le jour d'ouverture de la session extraordinaire de l’Assemblée nationale, la ministre française de la Culture, Françoise Nyssen, a cité en exemple les outils dont dispose le CSA britannique pour agir, dans certains cas précis, contre la chaîne locale de RT.

«C'est un enjeu de protection de notre démocratie vis-à-vis des tentatives de déstabilisation provenant d'Etats étrangers», a déclaré la ministre à propos des mesures que compte faire adopter la majorité, ajoutant : «Nous ne pouvons pas nous permettre dans une naïveté coupable de ne pas nous doter des outils nécessaires pour nous défendre.» Françoise Nyssen a alors évoqué, pour appuyer son propos, l'Ofcom – le CSA britannique –, qui «a annoncé qu'il allait examiner l'hypothèse d'un retrait de la licence attribuée à RT Royaume-Uni, si l'utilisation illégale de la force par l'Etat russe contre le Royaume-Uni était démontrée après la tentative d'assassinat de l'ex-espion [Skripal] sur le sol britannique». Or, regrette la ministre, «rien dans la loi [française] aujourd'hui ne permettrait au CSA français d'envisager une telle décision». C'est pourquoi, continue-t-elle, «il est essentiel de prévoir dans la loi avec toutes les garanties de procédures nécessaires, des moyens d'action efficaces et proportionnés aux risques».

Pour justifier l'urgence de telles mesures, la ministre fait en outre valoir que le régulateur britannique avait ouvert des dossiers sur «sept cas de méconnaissance des règles d'impartialité par RT Royaume-Uni» et que le CSA français avait  «très récemment mis en demeure la chaîne RT France».

L'Ofcom a en effet annoncé dans un communiqué publié le 18 avril qu'il ouvrait sept nouvelles enquêtes concernant l'«impartialité» du traitement octroyé par RT à l'affaire de l'empoisonnement de l'ancien agent-double russe Sergueï Skripal à Salisbury au Royaume-Uni. L'organisme avait toutefois rappelé, dans le même texte, que le bilan de conformité de RT n'était «pas sensiblement différent des autres diffuseurs».

«Nous sommes ravis de voir que l'Ofcom a reconnu que le bilan de conformité de RT avait été similaire à celui des autres diffuseurs, mettant un terme à toutes les déclarations politiques dégradantes [...] contre notre chaîne», avait réagi RT dans un communiqué.

Concernant la mise en demeure de RT France par le CSA le 28 juin, la présidente de RT France, Xenia Fedorova, avait réagi en ces termes : «La mauvaise association entre la traduction et une vidéo spécifique diffusée le 13 avril dernier était une erreur purement technique, qui a été corrigée. Nous maintenons que RT France couvre tous les sujets, y compris le conflit en Syrie, de la manière la plus équilibrée, en donnant la parole à toutes les parties. Nous avons convenu de continuer à travailler de manière productive avec le CSA pour maintenir la qualité supérieure de nos contenus.» 

RT tout particulièrement ciblé ?

A la question de savoir si la future loi contre les fausses informations visait directement Russia Today, Françoise Nyssen estimait déjà, dans une interview donnée au quotidien Le Figaro en mars dernier, qu'elle allait «effectivement étendre les pouvoirs du CSA pour contrôler les services audiovisuels émanant de gouvernements étrangers».

Lors des débats précédents sur le sujet, le député et leader de La France insoumise (LFI), Jean-Luc Mélenchon, avait mis les pieds dans le plat : «Allons-nous et quand interdire Russia today [ancien nom de RT] et Sputnik ? Il n'y a pas d'autres sujets !», avait-il estimé.

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Un projet de loi controversé

Le fameux texte de lutte contre les fake news, rebaptisé loi sur la «manipulation de l'information», est soumis aux débats des députés depuis le 7 juin. 

Si les discussions s'éternisent sur ce projet de loi, c'est que plusieurs mesures prévues par les textes pourraient poser problème, notamment d'un point de vue juridique. A commencer par la définition même de la fausse information, à savoir «toute allégation ou imputation d'un fait, inexacte ou trompeuse». Autre point litigieux, le délai très court de 48 heures, laissé en pratique au juge pour établir la fausseté d'une information et décider d'une éventuelle sanction. 

Enfin, outre une crainte de la censure, qui pourrait poser problème au niveau du Conseil constitutionnel, c'est bien le travail des journalistes qui pourrait souffrir en raison de cette loi anti-fake news. «Imaginez que François Fillon ait utilisé ce texte lors des révélations sur de possibles détournements de fonds publics. Il aurait pu demander au juge des référés d'enjoindre au Canard enchaîné de cesser ses investigations au prétexte qu'elles sont de nature à altérer la sincérité du scrutin», explique Roseline Letteron, professeur de droit public à la Sorbonne, interrogée par Le Point.

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