A l'approche du sommet européen qui réunira les 28 et 29 juin à Bruxelles les dirigeants des pays membres de l'Union européenne (UE), Emmanuel Macron et Angela Merkel se sont rencontrés ce 19 juin au château de Meseberg, près de Berlin.
Nous voulons éviter que l'Europe ne se divise
L'occasion, pour le président de la République française et la chancelière allemande, de tenter de montrer un front uni, notamment sur le dossier de la crise migratoire, une semaine après l'épisode de l'Aquarius, navire de secours en mer avec plus de 600 migrants à son bord. Indésirable en Italie, le navire avait finalement pu accoster en Espagne. La chancelière a appelé à plus de solidarité européenne à l'égard des «pays les plus impactés [par la crise migratoire]», comme l'Italie. «Nous voulons éviter que l'Europe ne se divise», a-t-elle déclaré, appelant à apporter «une réponse européenne à l'immigration».
Celles et ceux qui pensent que cette Europe est bonne à détricoter
«Ce sommet intervient [...] à un moment de vérité pour chacun de nos Etats et pour notre continent», a pour sa part estimé Emmanuel Macron. «C'est aujourd'hui un vrai choix de société qui est aujourd'hui en discussion, c'est même peut-être un choix de civilisation», a-t-il ajouté.
Opposant d'une part «celles et ceux qui pensent que cette Europe est bonne à détricoter», et «d'autre part celles et ceux qui croient que nous pouvons faire avancer cette Europe», le président français a appelé à une «Union européenne plus souveraine et plus unie», martelant à maintes reprises ces deux termes : «souveraineté» et «unité».
Aussi, comme moyen de cette souveraineté européenne, théorisée notamment à l'occasion du discours de la Sorbonne fin septembre 2017, Emmanuel Macron a mis en avant des solutions supranationales déjà existantes, telle la relance du projet de Défense européenne, baptisé PESCO – Permanent Structured Cooperation en anglais – déjà annoncée en novembre 2017. Afin de répondre aux exigences italiennes concernant les flux migratoires, Emmanuel Macron a promis de s'attaquer aux filières d'immigration illégale en provenance de Libye, ainsi qu'aux «réseaux de passeurs».
Autre moyen avancé par le chef d'Etat français pour ressouder les Européens, la perspective d'un budget commun, prévue à l'horizon 2021. Pour autant, la chancelière allemande avait fait part début juin de sa frilosité sur le sujet, précisant que ce budget resterait «limité à deux chiffres en milliards d'euros», soit quelques dizaines de milliards.
Migrants : la France et l'Allemagne mises au pied du mur par l'Italie
Pour le tandem franco-allemand, il y a urgence à agir, afin de garder la main et éviter la désunion en Europe. La décision de Rome de barrer la route à l'Aquarius ses naufragés a exacerbé les tensions au sein de l'UE. Le 18 juin, rencontrant Angela Merkel, le président du Conseil des ministres italien Giuseppe Conte a prévenu : «Il faut des solutions européennes, sans quoi les initiatives bilatérales [entre Etats] signeront la fin de Schengen.» Et le chef du gouverment italien de poursuivre : «Nos frontières sont aussi celles de l'Europe : l'Italie ne peut pas continuer à agir toute seule», a encore martelé le chef du gouvernement italien.
Mise en cause pour sa politique migratoire jusque dans sa majorité et dans son gouvernement, Angela Merkel a reçu le président du Conseil italien Giuseppe Conte le 18 juin. En Italie comme en Allemagne, le temps est toutefois compté. Angela Merkel est en effet confrontée à une fronde de l'Union chrétienne-sociale (CSU), le parti frère de l'Union chrétienne-démocrate (CDU), et à son ministre de l'Intérieur, Horst Seehofer qui lui a posé un ultimatum ce 18 juin sur la question migratoire. Et en Italie, le gouvernement issu des élections législatives du 4 mars dernier, antisystème et anti-immigration, pourrait montrer une patience limitée.
Alexandre Keller