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Donald Trump et Kim Jong-un à Singapour : «occasion unique» pour la paix ou échec programmé ?

La rencontre avait failli être annulée. Elle aura bien lieu : Donald Trump et Kim Jong-un sont arrivés à Singapour. Mais des relations diplomatiques normales peuvent-elles se mettre en place après des mois de tensions ?

Quand Donald Trump et Kim Jong-un s'assiéront face à face le 12 juin pour un sommet sans précédent à Singapour, ils auront, selon le président américain, une «occasion unique» de résoudre la crise de la péninsule coréenne. Mais un certain nombre de sujets épineux les attendent. Washington exige tout d'abord une «dénucléarisation complète, vérifiable et irréversible (DCVI)» de la Corée du Nord. Selon les mots de Donald Trump, déjà présent à Singapour comme son homologue nord-coréen : «Ils doivent dénucléariser. S'ils ne dénucléarisent pas, cela ne sera pas acceptable.» 

Pyongyang n'a de cesse de parler de son engagement derrière l'objectif de «dénucléarisation de la péninsule coréenne». La formule est cependant sujette à interprétation et on ignore quelles concessions la Corée du Nord serait prête à accepter. En tout état de cause, l'agence de presse officielle nord-coréenne KCNA a rapporté que «la question de l'établissement d'un mécanisme de maintien de la paix permanent» dans la péninsule était une des priorités de la rencontre.

D'après les estimations de Séoul, le Nord dispose de 50 kilogrammes de plutonium, soit, selon la presse, assez pour confectionner une dizaine de bombes, et a la capacité «considérable» de produire des armes avec de l'uranium. De précédents accords ont volé en éclats et certains commentateurs doutent de la volonté du dirigeant nord-coréen de renoncer à sa force de dissuasion nucléaire. Ainsi, Siegfried Hecker, spécialiste américain, a déclaré qu'une dénucléarisation totale et immédiate était «inimaginable» et «reviendrait au scénario d'une reddition de la Corée du Nord». En outre, d'après les experts, il faudra plusieurs années pour démanteler un arsenal nucléaire construit en secret pendant des décennies, un processus extrêmement difficile à surveiller.

Nord et Sud sont toujours techniquement en guerre, le conflit de 1950-53 s'étant achevé sur un armistice que le dirigeant sud-coréen de l'époque s'était refusé à signer. Il créait la Zone démilitarisée (DMZ) qui consacrait la division de la péninsule. Lors du sommet inter-coréen de cette année, Kim Jong-un et le président sud-coréen Moon Jae-in étaient convenus de rechercher un traité de paix. Séoul a annoncé la semaine dernière que des discussions tripartites avec Pyongyang et Washington avaient cours pour une déclaration liminaire sur le sujet. Celle-ci précéderait un traité en bonne et due forme, qui engloberait des problèmes complexes nécessitant des négociations laborieuses. Il faudrait, en outre, impliquer la Chine, signataire de l'armistice et soutien du Nord pendant la guerre.

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Trump va-t-il inviter Kim à la Maison Blanche ?

«On pourrait tout à fait signer un accord et c'est ce qu'on vise», a cependant déclaré Donald Trump. «Cela a l'air un peu étrange, mais c'est probablement le plus facile.» Le président américain a agité la carotte d'une normalisation des relations diplomatiques entre anciens ennemis, voire une invitation à la Maison Blanche pour le dirigeant nord-coréen. «Peut-être qu'on pourrait commencer par la Maison Blanche, qu'est-ce que vous en pensez ?», a-t-il répondu, alors qu'on lui demandait si Kim Jong-un serait invité à Washington ou dans sa propriété de Mar-a-Lago en Floride.

L'autre facteur incitatif serait la levée des sanctions de l'ONU contre Pyongyang. Mais Washington a fait valoir qu'elles ne pourraient disparaître que si la dénucléarisation était complète. Pyongyang veut un allègement par «étapes» à mesure des progrès vers cet objectif.

Des tensions ravivées au dernier moment par le conseiller de Trump

Au vu des déclarations fracassantes voire belliqueuses de l'administration Trump ces derniers mois, Pyongyang a néanmoins des raisons d'être inquiet. D'après Moon Jae-in, le président Nord-Coréen «a des inquiétudes sur le fait de savoir s'il peut faire confiance aux Etats-Unis pour mettre un terme à leur politique hostile et garantir la sécurité du régime quand le Nord se sera dénucléarisé». Le sommet avait failli dérailler quand John Bolton, conseiller à la sécurité nationale de Donald Trump, avait évoqué le «modèle libyen» de désarmement. En effet, quelques années plus tard, le dirigeant libyen Mouammar Khadafi avait été tué lors d'un soulèvement soutenu par l'Occident.

L'administration Trump a promis de ne pas demander de changement de régime, et le secrétaire d'Etat Mike Pompeo a même évoqué l'éventualité d'offrir des garanties de sécurité au Nord. Mais les sceptiques se demandent pourquoi Kim Jong-un ferait confiance à Donald Trump au vu de sa propension à se retirer de certains accord, comme celui sur le nucléaire iranien : «Pourquoi Kim [...] croirait-il les promesses du président Trump quand il déchire arbitrairement des accords respectés par l'autre partie ?», demande ainsi Anthony Blinken, numéro deux de la diplomatie américaine sous Barack Obama.

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