La mise en scène de la mort du journaliste russe Arkadi Babtchenko organisée avec l’aide des plus hautes autorités ukrainiennes n’est pas du goût de la Fédération internationale des journalistes (FIJ). Si elle se réjouit, ce 31 mai, que le journaliste russe soit toujours en vie, elle n’a pas pour autant épargné le procédé de ses critiques.
«En répandant faussement la nouvelle de son assassinat, les autorités ukrainiennes ont gravement porté atteinte à la crédibilité de l'information, et leur communication court le risque d'être prise pour une opération de propagande», déplore dans un communiqué Philippe Leruth, le président de la FIJ.
«Nous ne sommes plus dans une affaire journalistique, mais dans un grand cirque orchestré par des militaires et par un journaliste qui était menacé de mort depuis des semaines», s’indigne le secrétaire général de la FIJ, Anthony Bellanger, dans le même communiqué.
«Il est intolérable de mentir aux journalistes du monde entier et de tromper des millions de citoyens qui se sont émus à juste titre de ce soi-disant assassinat. Il est inadmissible enfin d’orchestrer la mort d’un journaliste, surtout quand deux d’entre eux tombent toutes les semaines depuis janvier, dont le dernier au Mexique ce 29 mai», estime-t-il par ailleurs.
Dans son communiqué, le FIJ rappelle que «le journalisme est la recherche de la vérité et que toute manipulation de l’information entache de manière dramatique la crédibilité des médias et de la profession dans son ensemble».
Une partie de la presse n’épargne pas Arkadi Babtchenko
Même tonalité au sein d’une partie de la presse. The Guardian compare cette affaire aux romans de l’auteur ukrainien Andrei Kourkov, dont les histoires«tournent souvent autour des meurtres sous contrat».
Le Monde, dans un éditorial titré «une manipulation toxique», craint que cette mise en scène ne «donne du grain à moudre aux fanatiques des théories du complot et autres pourfendeurs des médias et des journalistes…».
Par ailleurs, de nombreux journalistes ont également fait part de leur exaspération. «Donc maintenant à chaque fois qu'un journaliste est assassiné, les responsables vont lâcher leurs propagandistes et leurs robots pour dire que c'est une fake news. Merci les services de sécurité ukrainiens, c'est très utile pour tous ceux qui se préoccupent de la sécurité des journalistes», a écrit sur Twitter Lindsey Hilsum, journaliste de la chaîne britannique Channel 4.