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Arménie : le Premier ministre Serge Sargsian démissionne après une vague de manifestations

Poussé vers la sortie par une vague de manifestations, le Premier ministre arménien Serge Sargsian a quitté ses fonctions, ce qui représente une victoire pour les forces d'opposition mobilisées depuis plusieurs jours.

Le Premier ministre arménien Serge Sargsian a présenté sa démission le 23 avril, face aux protestations antigouvernementales qui secouent depuis 11 jours l'Arménie, ex-république soviétique du Caucase, selon l'agence de presse officielle arménienne Armenpress.

«Je quitte le poste de dirigeant du pays», a annoncé Serge Sargsian, selon son service de presse cité par l'agence. «[Le chef de la contestation et député] Nikol Pachinian avait raison. Et moi, je me suis trompé», a-t-il ajouté. Serge Sargsian a récemment été nommé Premier ministre, après avoir été président durant une décennie.

Cette annonce surprise est intervenue quelques heures après la libération de Nikol Pachinian, interpellé la veille lors d'une manifestation de l'opposition et qui a aussitôt rejoint les protestataires dans les rues d'Erevan en lançant : «Tout le monde a déjà compris que nous avons gagné !»

Des milliers de manifestants réunis le 23 avril sur la place de la République, en plein centre de la capitale arménienne, où est situé le siège du gouvernement, ont accueilli par des cris de joie et des applaudissements la nouvelle de la démission du Premier ministre. 

Un groupe de militaires a également rejoint les protestations le 23 avril, selon le ministère arménien de la Défense, qui a promis des «poursuites» contre ces soldats d'«une brigade de maintien de la paix [...] qui ont violé la loi» en participant au défilé antigouvernemental. On les voit sur ce tweet s'affranchir des barricades pour rejoindre les protestataires.

De nombreux anciens militaires en uniforme et des étudiants de la faculté de médecine, vêtus de leurs blouses blanches, ont également participé à ces manifestations, brandissant des drapeaux arméniens et bloquant brièvement les rues. «Serge Sargsian est un dirigeant qui a une mentalité soviétique. Et le monde d'aujourd'hui exige qu'on manifeste une approche tout à fait nouvelle face aux problèmes», a déclaré à l'AFP un manifestant, Karen Khatchatrian, étudiant de 23 ans.

Pour leur part, le président du Parlement Ara Babloïan, le premier vice-Premier ministre arménien, Karen Karapétian, ainsi que le ministre de la Défense Viguen Sargsian, ont appelé le 23 avril à un «dialogue» entre les manifestants et les autorités. «Je ne veux pas qu'un Arménien se batte contre un autre Arménien», a déclaré ainsi le ministre de la Défense arménien, lors d'une conférence de presse.

Le Kremlin suit «attentivement la situation en Arménie», un «pays extrêmement important» pour la Russie et son «très proche allié», a déclaré à Moscou le porte-parole du président Vladimir Poutine, Dmitri Peskov, en prenant soin de souligner que ce mouvement de protestation était «une affaire intérieure arménienne».

Des dizaines de milliers d'opposants dans la rue le 22 avril

L'interpellation de Nikol Pachinian, 42 ans, a été suivie le 22 avril au soir par une grande manifestation de protestation qui a rassemblé des dizaines de milliers de personnes sur la place de la République, au centre de la capitale, où se trouve le siège du gouvernement et où d'importants effectifs de la police avaient été déployés.

Cette première manifestation organisée en l'absence de Nikol Pachinian s'était terminée dans le calme. Les manifestants avaient cependant réitéré leur volonté de poursuivre les rassemblements jusqu'à ce que Serge Sargsian démissionne.

Depuis le 13 avril, les manifestations se sont succédé pour exiger la démission de Serge Sargsian, accusé par les contestataires de s'accrocher à tout prix au pouvoir. Après dix ans à la tête de l'Etat, le dirigeant avait fait voter une réforme constitutionnelle qui donnait des pouvoirs renforcés au Premier ministre et laissait au président un rôle essentiellement honorifique. Les manifestants reprochaient également à cet ancien militaire de 63 ans, de n'avoir pas su faire reculer la pauvreté et la corruption, alors que les oligarques ont toujours la haute main sur l'économie du pays.

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