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Attaque chimique présumée en Syrie : l'OIAC annonce l'envoi d'une équipe d'enquête à Douma

Accusée d'être à l'origine d'une supposée attaque chimique dans la Ghouta, Damas a appelé à une enquête sur le terrain, de même que Moscou et l'ONU. L'OIAC a annoncé qu'une équipe se rendrait sur place.

Mardi 10 avril

En conférence de presse à Paris au côté d'Emmanuel Macron, le prince héritier saoudien Mohamed Ben Salmane a déclaré, évoquant d'éventuelles frappes contre l'armée syrienne, que Riyad répondrait présent si nécessaire.

L'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) basée à La Haye aux Pays bas, a annoncé l'envoi d'une équipe à Douma, dernière poche tenue par les rebelles de Jaïch al-Islam pour enquêter sur l'attaque chimique présumée du 7 avril 2018.

L'OIAC a demandé aux autorités syriennes «de faire les arrangements nécessaires pour ce déploiement». «Cela coincide avec la requête de la République arabe syrienne et de la Fédération de Russie d'enquêter sur les allégations de l'utilisation d'armes chimiques à Douma», a précisé l'OIAC, citée par Reuters.

Les alliés du «régime» de Damas ont une «responsabilité particulière» dans les «deux» attaques «chimiques» qui «ont eu lieu» contre la ville de Douma, a affirmé le 10 avril le Premier ministre Edouard Philippe, visant notamment sans la nommer la Russie.

«Je veux dire que les alliés du régime ont une responsabilité particulière dans ce massacre» ainsi que dans la «violation de la trêve» prévue par le Conseil de sécurité de l'ONU, a déclaré le Premier ministre devant l'Assemblée nationale, promettant une «réaction» française qui «dira des choses de ce que nous sommes».

Trump annule son voyage en Amérique latine pour se concentrer sur la Syrie. Le président américain ne participera pas, comme initialement prévu, au sommet des Amériques en fin de semaine à Lima, au Pérou, mais restera à Washington pour gérer le dossier syrien, a annoncé le 10 avril la Maison Blanche.

«A la demande du président, le vice-président, Mike Pence, voyagera à sa place», a indiqué Sarah Sanders, porte-parole de l'exécutif. «Le président restera aux Etats-Unis pour superviser la réponse américaine à la Syrie», a-t-elle ajouté.

Le Premier ministre français Edouard Philippe a affirmé que les alliés de Damas avaient une «responsabilité particulière» dans l'attaque chimique présumée.

«La Syrie souhaite coopérer avec l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) pour rétablir la vérité suite aux accusations que certaines parties occidentales propagent pour justifier leurs velléités agressives», a déclaré l'agence de presse officielle syrienne Sana, citant une source officielle du ministère des Affaires étrangères syrien.

Le gouvernement syrien invite l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) à envoyer une équipe pour enquêter sur les accusations d'attaque chimiques à Douma.

Moscou a annoncé ce 10 avril son intention de déposer à l'ONU une résolution demandant une enquête sur l'attaque chimique présumée.

«Nous déposerons aujourd'hui un projet de résolution qui exigera une enquête», a déclaré le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov, ajoutant : «Nous sommes intéressés à ce que [participent à cette enquête] les experts indépendants de l'OIAC [l'Organisation internationale sur les armes chimiques].»

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Le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, se disant outré par l'attaque chimique présumée en Syrie, a appelé à son tour à une enquête «impartiale» donnant un accès sans entrave aux enquêteurs internationaux dans Douma, dernière poche aux mains des combattants de Jaïch al-Islam dans la Ghouta orientale (est de Damas).

Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a déclaré ce 10 avril que la position des Etats-Unis sur la supposée attaque chimique en Syrie n'était pas pragmatique.

«Vous voyez la position non constructive adoptée par quelques pays, dont les Etats-Unis. Ils refusent de regarder la réalité en face», a-t-il dénoncé, ajoutant que «personne parmi [les Occidentaux] ne parle de la nécessité de mener une enquête impartiale».

«Si la ligne rouge a été franchie» en Syrie, il y aura «une riposte» de la France, a prévenu ce 10 avril le porte-parole du gouvernement français Benjamin Griveaux sur Europe 1, après un nouvel entretien téléphonique dans la nuit entre les présidents français et américain. 

Il a précisé que les échanges d'informations entre Emmanuel Macron et Donald Trump confirmaient «a priori l'utilisation d'armes chimiques».

Le représentant syrien, le dernier à s'exprimer, a accusé, entre autres, les Etats-Unis, la France et l'Arabie saoudite d'avoir armé les groupes terroristes en Syrie.

Il a ensuite conseillé aux pays le souhaitant de soumettre une demande au gouvernement syrien pour accueillir chez eux des «rebelles modérés [...] avec leurs armes légères, leurs longues barbes et leurs drapeaux noirs».

Lundi 9 avril

Alors que le Conseil de sécurité de l'ONU se réunit en urgence, Israël a condamné, par un communiqué du porte-parole du ministère des Affaires étrangères, l'attaque chimique présumée en Syrie, accusant Damas d'avoir commis «un crime contre l'humanité».

«Le dernier cas d'utilisation de gaz prouve de façon claire que la Syrie continue, malgré ses engagements, à détenir des armes chimiques meurtrières et qu'elle s'est même dotée de nouvelles capacités de production», peut-on encore lire dans le communiqué.

Le ministère ne s'est en revanche pas exprimé sur la frappe ayant visé le 9 avril une base aérienne en Syrie, alors que Damas, ainsi que ses deux alliés Moscou et Téhéran, ont accusé Israël d'avoir mené cette attaque.

Les Etats-Unis «répondront» à l'attaque chimique meurtrière en Syrie, que le Conseil de sécurité des Nations unies agisse ou non, a fait savoir la représentante des Etats-Unis aux Nations unies, Nikki Haley. Cette dernière a tenu à avertir ses collègues : «L'histoire se rappellera du moment où le Conseil de sécurité s'est acquitté de son devoir ou a démontré son échec complet et total à protéger le peuple syrien.» Et d'ajouter : «De toute façon, les Etats-Unis vont répondre.»

La France a mis en cause la Russie devant le Conseil de sécurité de l'ONU, dans les attaques chimiques présumées commises à Douma, en Syrie, jugeant qu'elle n'avait pu ignorer les bombardements aériens de Bachar el-Assad.

«L'appui militaire russe et iranien est présent sur le terrain et à tous les échelons de l'appareil de guerre syrien, et aucun avion syrien ne décolle sans que l'allié russe en soit informé», a fait valoir l'ambassadeur français à l'ONU, François Delattre. «Ces attaques [du 7 avril] sont intervenues donc soit avec l'accord tacite ou explicite de la Russie, soit malgré elle et en dépit de sa présence militaire», a-t-il ajouté.

La représentante américaine à l'ONU, Nikki Haley, a affirmé que le moment était venu «de rendre justice» après l'attaque chimique présumée à Douma.

«Nous en sommes arrivés à un point où le monde doit voir que justice est rendue», a-t-elle assuré. «Qui a fait cela ? Seul un monstre peut faire cela», a-t-elle poursuivi lors de sa prise de parole au Conseil de sécurité. «Les Etats-Unis sont déterminés à voir ce monstre qui a lâché des bombes chimiques sur le peuple syrien rendre des comptes», a-t-elle ajouté.

L'émissaire des Nations unies pour la Syrie, Staffan de Mistura, a prévenu le Conseil de sécurité de l'ONU contre les dangers d'une «escalade incontrôlable» impliquant les différentes puissances internationales présentes en Syrie.

«Les Nations unies sont incapables de vérifier de manière indépendante ou d'attribuer la responsabilité de cette attaque, mais nous devons faire preuve de la plus grande retenue et éviter toute nouvelle escalade ou confrontation», a déclaré Staffan de Mistura.

La Russie a mis en garde contre «de graves conséquences» en cas de frappes aériennes occidentales contre le gouvernement syrien, après l'attaque chimique présumée du 7 avril à Douma, pour laquelle Washington accuse Damas, qui dément.

«Nous appelons les Occidentaux à renoncer à la rhétorique guerrière», a souligné à l'ONU l'ambassadeur russe Vassily Nebenzia, soulignant l'absence de preuves d'une attaque chimique à Douma. Il a appelé des enquêteurs de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques à se rendre en Syrie, précisant que les troupes russes les escorteraient dans la zone de la prétendue attaque.

Estimant que les menaces occidentales contre Moscou étaient «pires que durant la guerre froide», il a lancé : «Vous rendez-vous compte du dangereux seuil vers lequel vous amenez le monde ?»

Le Conseil de sécurité de l'ONU s'est réuni en urgence le 9 avril pour évoquer l'attaque chimique présumée de Douma le 7 avril, que les Occidentaux attribuent sans preuve à Damas.

Washington multiplie les menaces contre le gouvernement de Bachar el-Assad et ses alliés après avoir accusé le gouvernement syrien d'avoir mené une attaque chimique à Douma, l'une des dernières poches tenues par les rebelles islamistes. Damas, qui est en passe de reprendre celle-ci, dément fermement. La Russie, elle, estime que ces accusations sont infondées et a fait savoir, après analyse, que ses médecins sur place n'avaient pas décelé de traces d'usage d'armes chimiques à Douma.

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