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Bombardements au Yémen, la trêve humanitaire brisée

Malgré une trêve humanitaire déclarée vendredi 10 juillet au soir, la coalition menée par l'Arabie saoudite a, dès le lendemain 11 juillet, procédé à de nouveaux bombardements.

Elle était censée durer jusqu'au 17 juillet, fin du ramadan, le mois de jeûne pour les musulmans. Mais cette trêve humanitaire aura été de courte durée. Quelques heures à peine après sa mise en place, des bombardements ont frappé la ville de Taiz, dans le centre du Yémen, où de violents affrontements opposaient les insurgés, les chiites Houthis, soutenus par l'Iran, aux troupes restées fidèles au président Abd Rabbo Mansour Hadi, en exil en Arabie saoudite depuis le mois de février.

Les bombardements ont consisté en deux raids aériens. Des avions de la coalition emmenée par l'Arabie saoudite ont ciblé des positions rebelles dans la rue Arbaeen, à Taiz, où les combats ont été les plus violents. D'après l'agence de presse officielle du Yémen, contrôlée par le gouvernement en exil, les frappes sont justifiées par le comportement des rebelles. L'agence les accuse en effet d'avoir fait venir des renforts à Taiz avant la mise en place de la trêve.

«Faire preuve de retenue, éviter toute escalade»

La trêve humanitaire avait été demandé par le Conseil de sécurité des Nations-Unies. Le but : disposant de sept jours sans affrontements, l'ONU souhaitait ouvrir aux ONG une fenêtre sécurisée pour acheminer de l'aide humanitaire vers le théâtre des affrontements. A cette fin, les 15 membres du Conseil de sécurité avaient demandé, unanimement, aux différents belligérants de «faire preuve de retenue au cas où des incidents isolés viendraient rompre cette trêve et d'éviter toute escalade».

«Tous les belligérants devront suspendre leurs opérations militaires pendant la pause», avait affirmé le Conseil, ajoutant qu'«aucune partie au conflit ne doit profiter de la pause pour déplacer des armements ou s'emparer de territoires». Enfin, il avait été demandé «à toutes les parties de faciliter la livraison urgente de l'aide humanitaire dans tout le Yémen».

Si le Conseil de sécurité de l'ONU insiste autant sur la mise en place et le respect de cette trêve, c'est parce que la situation humanitaire au Yémen a atteint des seuils critiques, en 2015. D'après les différents observateurs dépêchés sur place, des ONG aux institutions politiques, la situation est à son point le plus délicat, depuis le début du conflit, en 2011. En cause, la généralisation du conflit, qui, d'abord localisé, a pris une dimension nationale en mars 2015, dans un pays qui était déjà le plus pauvre du monde arabe, avec plus de 47% de la population vivant sous le seuil de pauvreté et disposant d'un budget de moins de deux euros par jour.

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D'après un rapport de la Commission européenne sur le Yémen, 15,9 millions de personnes ont aujourd'hui besoin d'une aide humanitaire, sur une population totale de 26 millions d'habitants. 12 millions de personnes sont en situation d'insécurité alimentaire, d'après le même rapport, qui indique que «le pays commence à manquer de fournitures essentielles» et que «les combats et les bombardements aériens engendrent de graves problèmes pour la protection des civils». Une affirmation étayée par le fait que le conflit a engendré plus de 250 000 réfugiés civils, ce qui pose d'importants problèmes en terme de déplacement des populations.

Le montant pour l'assistance humanitaire alloué au Yémen par la seule Commission européenne atteint la somme de 25 millions d'euros. Un montant révélateur de l'urgence de la situation et de l'importance du respect de la trêve humanitaire. En brisant cette trêve, la coalition, Arabie saoudite en tête, prend le risque de créer une situation d'escalade dans un conflit qui étouffe le pays. Une décision que la coalition devra justifier, alors que de nouveaux déplacements de populations sont envisagés par les différents acteurs humanitaires présents sur place.