La Defense Intelligence Agency (DIA), l'une des nombreuses agences de renseignement américaines, tire la sonnette d'alarme. Les informations recueillies par ses agents disséminés dans le monde entier, y compris par son Service d'opérations clandestines, la DCS (Defense Clandestine Service), peint un sombre tableau de la situation géopolitique dans l'avenir. Du moins pour les Etats-Unis. Selon les analystes, la Chine et la Russie auraient un intérêt commun à l'affaiblissement de l'Amérique.
«La coopération militaire entre les deux pays se développe lentement, de même que leurs liens économiques», notent-ils dans un rapport déclassifié le 28 juin 2017. Jusque-là, pourrait-on noter, rien que de très normal entre deux voisins, lesquels partagent plus de 4 200 kilomètres de frontière commune. En outre, les Occidentaux sont, eux, allés très loin dans l'intégration militaire, notamment dans le cadre de l'OTAN ou encore dans le cadre d'une Défense européenne qu'Emmanuel Macron ou le ministre des Finances allemand Wolfgang Schaüble entendent développer.
Mais ce n'est pas tout : «D'ici à dix ans, une Russie encore plus confiante et capable pourrait émerger. Les Etats-Unis doivent anticiper plutôt que réagir aux actions de la Russie et devraient renforcer leur expertise des objectifs de Moscou ainsi que les moyens de prévenir d'éventuels conflits», recommande la DIA, dont les conclusions sont autant de recommandations au président et au secrétaire à la Défense américains, ainsi qu'au comité des chefs d'états-majors interarmées.
Une stabilité russe inquiétante qui vaut bien un peu d'instabilité américaine ?
Comble du danger, pour les Etats-Unis qui disposent pourtant de bases militaires sur les cinq continents : «La Russie pourrait être tentée d'utiliser sa force militaire afin de promouvoir une stabilité [géopolitique] selon sa propre conception.» Traduire : une stabilité autre que celle que les Etats-Unis font prévaloir à l'échelle mondiale, notamment grâce à leurs forces armées. Aussi, la DIA met en garde les responsables américains. «Les mauvaises décisions – ou les bonnes mais prises trop tard – pourraient avoir des conséquences terribles», conclut le rapport alarmiste. De quoi renforcer les tenants des frappes et interventions préventives, comme en Syrie, où les Etats-Unis brandissent la menace hypothétique d'attaques chimiques de la part de Damas ?
Alexandre Keller
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