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UE : la Commission ouvre une procédure d'infraction contre la loi hongroise sur les universités

La Commission européenne a annoncé avoir ouvert une procédure d'infraction à l'encontre de la Hongrie concernant sa loi controversée sur les universités, qui menace de fermeture un établissement financé par le milliardaire américain George Soros.

«Nous avons décidé de lancer des mesures légales sur la loi sur les universités [adoptée en Hongrie] en envoyant une lettre de mise en demeure au gouvernement hongrois», a indiqué Valdis Dombrovskis, l'un des vice-présidents de l'exécutif européen, lors d'une conférence de presse, le 26 avril. Il s'agit de la première étape des procédures d'infractions que peut lancer l'exécutif européen qui peuvent aboutir à de lourdes sanctions financières pour les pays ne respectant pas le droit européen.

La loi hongroise sur les universités étrangères, adoptée le 11 avril dernier, risque d'entraîner la fermeture de l'Université d'Europe centrale (CEU) fondée par le financier américain d'origine hongroise George Soros, bête noire du Premier ministre hongrois, Viktor Orban. Cette loi et une autre, renforçant le contrôle sur les ONG en Hongrie, ont déclenché le plus important mouvement de protestation contre le gouvernement Orban depuis son entrée en fonction en 2010. Il s'est traduit par l'organisation de nombreuses manifestations à Budapest.

Les procédures européennes d'infraction visent à garantir l'application du droit européen par les Etats membres de l'Union européenne. Fin 2015, plus de 1 300 procédures avaient été ouvertes, selon des chiffres figurant sur le site internet de l'exécutif européen. Elles peuvent être ouvertes quand des pays tardent trop à transposer des directives européennes dans leur législation nationale, ou quand ils adoptent des dispositions nationales qui ne sont pas conformes aux normes européennes.

Si un pays refuse de suivre les recommandations de la Commission au cours d'une telle procédure, cette dernière peut saisir la Cour de justice de l'UE.

Soros et Orban : la Hongrie libérale contre la Hongrie conservatrice

A la fin des années 1980, le milliardaire hongrois George Soros finançait généreusement tous les opposants, scientifiques, étudiants ou artistes dissidents, afin de «provoquer de petites fractures dans le communisme» et de préparer l’avènement d’une «société ouverte». Or, Viktor Orban a lui-même directement bénéficié de cette politique en tant que boursier de la fondation Soros. Le futur chef de l'exécutif était alors l'un des hérauts de la contestation estudiantine contre le pouvoir communiste de Janos Kadar. 

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Depuis, le bloc soviétique s'est effondré et le spéculateur financier est devenu le principal ennemi des conservateurs hongrois, qui considèrent son combat politique pour une «société ouverte» comme une tentative de déstabilisation politique. «Il soutient tout ce qui affaiblit la nation, tout ce qui modifie le mode de vie traditionnel européen», avait déclaré Viktor Orban dans une interview radiophonique accordée à la radio Kossuth en 2016.

Depuis la crise des migrants et les plaidoyers de George Soros en faveur d'une ouverture des frontières, les tensions entre les deux hommes se sont exacerbées et sont devenues emblématiques d'une opposition idéologique : un camp libéral, favorable à l'immigration et pro-Union européenne lutte contre un camp conservateur, attaché aux traditions et souverainiste. 

Pour George Soros, Viktor Orban «prend en otage les valeurs européennes». Réagissant au vote de la loi sur les universités, le milliardaire a dénoncé la «politique autoritaire» du premier ministre. Pour Viktor Orban, George Soros incarne «le trafic mondial d'êtres humains» que constituerait l'immigration de masse. Quant aux étudiants de la CEU, ils ont d'ores et déjà annoncé de nouvelles actions. En attendant l'entrée en vigueur de la loi, les cours continuent normalement.