Alors qu'un nouvel Eurogroupe «de la dernière chance» doit avoir lieu, samedi 27 juin, le premier ministre grec a annoncé son intention de demander l'avis de son peuple. La question posée : «savoir si nous acceptons ou rejetons la proposition [des créanciers]» a indiqué Alexis Tsipras, dans une allocution télévisée de cinq minutes, diffusée sur toutes les chaînes de télévision grecques.
Le premier ministre a également qualifié d'«ultimatum» la proposition émise par la troïka : l'Union Européenne (UE), la Banque Centrale Européenne (BCE) et le Fond Monétaire International (FMI). Cet accord prévoyait le versement de 12 milliards d'euros en quatre fois d'ici fin novembre, ainsi que la mise en place de nouvelles réformes d'austérité pour assurer la stabilité économique du pays. Pour le chef du gouvernement grec, cette proposition «sape la relance de la société et de l'économie grecque». Sa suggestion de passer par le mode du référendum a été adoptée «à l'unanimité» par le conseil des ministres. Le peuple doit s'exprimer sur le sujet lors d'un vote, le 5 juillet 2015.
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Un mise en place dans l'urgence
Décidé en conseil des ministres, dans la nuit du vendredi 26 au samedi 27 juin, ce référendum doit avant tout être jugé opportun par le parlement grec. Un débat doit s'ouvrir à 12h, samedi 27, et doit amener les députés à un vote à 19h. Le parti au pouvoir, qui dispose de 162 sièges sur les 300 de l'hémicycle, a annoncé qu'il appellera le peuple à voter «non» et ainsi à rejeter la proposition des créanciers.
Les députés de Syriza devront néanmoins faire face à une forte résistance de la part des représentants des partis d'opposition, dont les leaders ont déjà exprimé leur réprobation. L'ancien premier ministre, Antonis Samaras (droite), qui avait accepté sans concession les exigences des créanciers lorsqu'il était au pouvoir, a accusé son successeur de mener le pays «à l'impasse». Potami, le parti de centre-gauche, estime pour sa part que Syriza se fait «le lobby du drachme». Les socialistes de Pasok enfin, ont été jusqu'à demander la démission du gouvernement en place et ont appelé à des élections anticipées.
Malgré ces divergences d'opinion, le rejet de la proposition de la troïka est probable, de la part d'un peuple écrasé sous des réformes austères depuis 2009. La situation en Grèce, notamment vis-à-vis de l'UE, a amené la population à un haut niveau d'euroscepticisme. Le chômage concerne aujourd'hui 25,8% de la population active (contre 7,3% en 2008). Les jeunes en sont les principaux représentants avec un taux dépassant les 50% de chômeurs. Le pays fait également état d'un taux de pauvreté qui dépasse les 23%, la pauvreté infantile se situant à 26,5% en 2012. Des conditions de vie qui ont connu une forte dégradation depuis les premiers plans d'austérité, mais aussi antérieurement, depuis l'entrée de la Grèce dans la zone euro. A l'image des pays du sud, la péninsule a subi de plein fouet l'application de la Politique Agricole Commune, décriée par les professionnels du secteur partout en Europe.
L'Eurogroupe de la dernière chance
Le premier ministre grec avait déjà prévenu qu'un référendum était envisageable en cas de désaccord entre la Grèce et ses créanciers. L'homme a malgré tout créé la surprise avec une annonce qui vient bousculer l'ordre du jour d'un nouveau sommet de l'Eurogroupe, dont beaucoup estiment qu'il pourra être le dernier pour la Grèce en tant que membre de la zone euro.
Suite à cette annonce, la présence même de la Grèce à ce sommet, qui réunit les ministres de la finance de la zone euro, était sujette à interrogations. Le voile à été levé, samedi matin, avec l'annonce de la participation du pays, représenté par son ministre des finances, Yanis Varoufakis. La question du référendum risque d'être le point névralgique des débats, et l'étude d'un «plan B» paraît envisageable, d'après un officiel de la zone euro. Une discussion souhaitée «par un certain nombre de pays,» selon la même source.
Avec ce nouveau rebondissement, l'avenir de la Grèce et sa présence au sein de la zone euro semblent plus qu'incertains. Malgré cette décision pour le moins radicale, qui rappelle les précédents référendums menés par Georgios Papandréou (premier ministre grec entre 2009 et 2011), Alexis Tsipras affirme ne pas vouloir couper toute possibilité de discussion avec les créanciers de son pays. Des consultations ont d'ailleurs été lancées entre son gouvernement et Mario Draghi, le président de la BCE, en marge de l'Eurogroupe.