Selon les scientifiques dont la découverte est rapportée le 13 avril dans la revue américaine Science, «des réactions hydrothermales entre des roches chaudes et l'océan se trouvant sous la surface gelée de la lune [de Saturne] sont la seule source plausible de cet hydrogène». «Bien que nous n'ayons pas détecté la vie, nous avons trouvé une source d'alimentation de la vie», a expliqué Hunter Waite, du Southwest Research Institute à San Antonio (Texas).
Sur Terre, ce processus procure l'énergie aux écosystèmes qui se développent à proximité des cheminées hydrothermales au fond des océans où il y a une activité volcanique. «C'est la première fois que nous identifions un endroit rassemblant les ingrédients nécessaires à un environnement habitable», a pointé Thomas Zurbuchen, responsable adjoint des missions scientifiques de la Nasa, lors d'une conférence de presse. «Ces résultats prouvent que les différentes études menées par l'agence nous rapprochent du moment où nous pourrons répondre à la question de savoir si nous sommes seuls ou non dans l'univers», a-t-il relevé.
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«Avancée importante»
Les instruments de Cassini ont détecté cet hydrogène moléculaire en octobre 2015, quand la sonde s'est approchée au plus près de la surface d'Encelade – à environ 50 kilomètres – pour traverser un énorme geyser dans la région du pôle sud.
Les chercheurs ont déterminé que la vapeur et ses particules, en très grande partie formée d'eau, contenaient entre autres jusqu'à 1,4% d'hydrogène et du dioxyde de carbone. Ces éléments sont essentiels à la méthanogénèse, une réaction chimique permettant sur Terre à des microbes de vivre dans des profondeurs océaniques que les rayons du soleil ne peuvent atteindre.
Selon les estimations des scientifiques, Encelade offre l'équivalent en énergie de 300 pizzas par heure ce qui serait amplement suffisant pour subvenir aux besoins d'une éventuelle vie microbienne. «C'est la première fois que nous sommes en mesure de compter les calories d'un océan extraterrestre», a relevé Christopher Glein, géochimiste de l'institut de recherche texan.
«Cette observation représente une avancée importante pour évaluer l'habitabilité d'Encelade», estime dans un article accompagnant l'étude, Jeffrey Seewald, un scientifique du Woods Hole Oceanographic Institution.
«Cela indique qu'il y a le potentiel chimique nécessaire à la vie microbienne», a souligné Hunter Waite.
«Telle que nous la connaissons, l'apparition de la vie requiert trois principaux éléments : de l'eau liquide, une source d'énergie pour le métabolisme des organismes et des ingrédients chimiques, en particulier le carbone, l'hydrogène, l'azote, l'oxygène, le phosphore et le soufre», ont précisé les scientifiques. Les données récoltées par Cassini montrent qu'Encelade possède quasiment tous les ingrédients indispensables à l'habitabilité.
Un autre geyser sur Europe?
Cassini avait déjà collecté des éléments révélant la présence d'un vaste océan sous une épaisse couche de glace au fond duquel se trouve un socle rocheux.
Par ailleurs, une étude également publiée le 13 avril dans l'Astrophysical Journal Letters révèle que grâce au télescope spatial américain Hubble, des scientifiques ont observé en 2016 ce qui paraît être un geyser d'une centaine de kilomètres de hauteur sur l'Europe, une des plus grosses lunes de Jupiter qui possède aussi un océan sous une couche de glace. Hubble avait saisi des images d'un jet de vapeur au même endroit en 2014, mais qui n'atteignait que 50 kilomètres.
Ces découvertes sur Encelade et Europe vont aider la Nasa à préparer la mission Clipper d'exploration d'Europe, dont le lancement est prévu dans les années 2020.
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La mission de Cassini, en orbite autour de Saturne depuis 2004, approche de sa fin. La sonde va amorcer des manœuvres qui la feront plonger dans l'atmosphère de la planète gazeuse géante le 15 septembre prochain. Elle doit effectuer le 26 avril la première descente dans l'espace inexploré des 2 400 kilomètres séparant Saturne de ses anneaux, a précisé la Nasa.