Au quatrième et dernier tour de scrutin, Antonio Tajani l'a remporté par 351 voix contre 282 pour son adversaire de gauche, Gianni Pittella, un autre Italien, a indiqué le président du Parlement européen sortant Martin Schulz devant les eurodéputés qui ont applaudi le vainqueur.
«Je serai le président de tous. Je respecterai tous les groupes, vous pourrez comptez sur ma totale disponibilité», a assuré Antonio Tajani.
«Je voudrais dédier ce résultat, cette victoire, aux victimes du tremblement de terre qui a frappé mon pays [...]. Je voudrais envoyer un message très fort de solidarité de la part de ce Parlement envers toutes les victimes du terrorisme, sans oublier ceux qui souffrent en ce moment, qu'il s'agisse de ceux qui sont sans abri ou qui n'ont pas de travail», a plaidé le candidat du Parti populaire européen (PPE).
Dans un tweet, le président du Conseil de l'UE, le Polonais Donald Tusk, a félicité l'Italien au nom des Etats membres, en se disant «prêt à coopérer» avec lui. «Une UE forte et unie a besoin d'un Parlement européen constructif et efficace», a écrit Donald Tusk, qui appartient lui aussi au PPE.
Lors du dernier tour de scrutin, il y a eu 713 votes, dont 80 blancs et nuls, a précisé Martin Schulz.
Lors des trois premiers tours de l'élection, six candidats étaient en lice, mais aucun n'est parvenu à atteindre la majorité absolue nécessaire.
Un homme de réseaux qui «connaît tout le monde»
Elégance discrète, visage de patricien romain, sourire aimable, Antonio Tajani porte bien ses 63 ans.
Ancien journaliste de l’audiovisuel italien (RAI) puis du quotidien Il Giornale, membre fondateur du parti Forza Italia de Silvio Berlusconi, il est l'ombre de ce dernier à Bruxelles et au sein du Parti populaire européen (PPE, droite).
Homme de contact, il respecte à la lettre les consignes du Cavaliere : costume sobre, cravate discrète et poignée de main ferme.
Très communicatif et polyglotte (il parle Français, Anglais et Espagnol), il est cajolé par les journalistes européens.
Antonio Tajani a aussi été vivement critiqué à la suite du «Dieselgate», en tant qu'ancien commissaire chargé de la législation aujourd'hui mise en cause sur les mesures des émissions de gaz polluants.
Au départ, «le favori était Alain Lamassoure». Mais le groupe PPE a voté à bulletin secret et le Français été balayé, «victime de la méfiance des élus allemands, qui le jugent trop indépendant, et de la trahison de certains de ses amis politiques français», selon une source au parlement qui l'a indiqué à,l'AFP.
«Antonio Tajani a gagné parce qu'il a toujours été loyal et parce que chaque élu le connaît personnellement», a expliqué l'eurodéputé conservateur allemand Andreas Schwab.
«On peut compter sur lui, il tient parole», a renchéri un autre parlementaire conservateur allemand, Markus Ferber.
La force d'Antonio Tajani réside donc dans le fait qu'il connaît tout le monde au Parlement européen, où il siège depuis 1994, mais aussi au sein de la Commission européenne, dont il a été membre de 2008 à 2014, ainsi qu'au sein du Conseil des chefs d'Etat et de gouvernement grâce à son mandat de vice-président du PPE depuis 2002.
«Il a rendu service à énormément de gens et beaucoup d'élus sont ses obligés», a expliqué à l'AFP un responsable de groupe sous couvert de l'anonymat.
«Il n'a pas vraiment d'ennemis. Tajani c'est la politique des réseaux et de l'affabilité», précise un autre responsable.
«L'ironie dans cette affaire, c'est qu'un disciple de Berlusconi va remplacer Martin Schulz», remarque un vieux routier du Parlement, en faisant allusion à un accrochage entre l'Italien et l'Allemand, resté dans les annales européennes.
L'incident avait eu lieu en 2003 : excédé par les critiques de Martin Schulz, Berlusconi lui avait suggéré de postuler pour un rôle de «Kapo» (un détenu de droit commun qui encadrait les prisonniers dans les camps nazis) dans une série télévisée en tournage en Italie.
«C'est Tajani qui a calmé le esprits au sein du groupe PPE après cette attaque scandaleuse et il est intervenu auprès de Berlusconi pour qu'il s'excuse auprès de Schulz», rappelle Markus Ferber.
Président du Parlement européen, Antonio Tajani va chercher à se démarquer de son prédécesseur, qui a exercé un pouvoir omnipotent au perchoir.
«Nous n'avons pas besoin d'un président du Parlement européen fort. Nous avons besoin d'un Parlement européen fort», a plaidé Antonio Tajani. «Je suis un homme de consensus, je veux être le président de tous les députés», a-t-il ajouté.