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Election du président du parlement européen : les «eurosceptiques» en arbitres du scrutin ?

L'élection du prochain président du Parlement de Strasbourg ne sera pas une simple formalité. Les grandes formations politiques traditionnelles n'ayant pas réussi à s'entendre, les souverainistes pourraient s'engouffrer dans la brèche.

Les partis dominants «europhiles» du parlement européen ne pouvaient pas aborder l'élection du prochain président du parlement européen dans de pires conditions. D'autant qu'ils ont créé eux-mêmes cette situation après avoir échoué à s'entendre. Le Parti populaire européen (PPE, droite et centre droit), le Parti socialiste européen (PSE), et Alliance des démocrates et des libéraux pour l'Europe (ALDE) : chacune des grandes formations europénnes présente son propre candidat, et aucun ne semble pouvoir obtenir la majorité absolue dès le premier tour de scrutin.

Après le renoncement de l'actuel président Martin Schulz, lequel ne briguera pas un troisième mandat afin de se lancer dans le jeu politique domestique allemand, les députés européens n'en finissent pas de se déchirer. Et les partis anti-européens ne comptent pas leur faciliter les choses.

Les groupes politiques européens en ordre dispersé

Les alliances stratégiques explosent donc en plein vol au dernier moment et les grands partis du parlement européens se présentent à l'élection du président du parlement européen en ordre dispersé. 

Dénonçant ni plus ni moins qu'une «trahison», le président du PPE Parti populaire européen (droite) Manfred Weber a ainsi fustigé ses anciens alliés socio-démocrates du Parti socialiste européen (PSE). Le libéral Guy Verhofstadt a même jeté l'éponge et s'est retiré de la course après avoir tenté une alliance presque contre-nature avec le Mouvement 5 étoiles (M5S) de l'italien Beppe Grillo. Une initiative qui avait déclenché un tollé et une pluie de critiques de la part des députés de l'ALDE.

Stratégies hasardeuses 

Le M5S se situe en effet aux antipodes du projet européiste du parti de l'Alliance des démocrates et des libéraux pour l'Europe (ALDE), qui avait qualifié un tel accord avec l'un des partis les plus anti-immigration et «europhobe» du parlement européen, de «cauchemar absolu» et de «danger populiste pour l'Europe», selon la rhétorique anxiogène commune.

Si aucun des partis souverainistes ne présente de candidat ayant de véritables chances de l'emporter, l'élection du prochain président du parlement européen, ainsi que de 14 vice-présidents, risque de se faire dans la douleur. L'Ukip comme le M5S ou encore le groupe Europe des nations et des libertés (ENL) dont font partie les députés européens du Front national, n'ont pas l'intention de leur faciliter les choses.

Un prochain président affaibli ?

Le prochain président du parlement sera vraisemblablement italien. Les deux candidats principaux, un peu par défaut, sont un certain Antonio Tajani pour le PPE et Gianni Pittella pour le PSE. Mais aucun n'est connu du grand public, pour qui le Parlement européen reste une institution éloignée de leurs préoccupations quotidiennes.

Et ce, alors que l'Union européenne traverse une grave crise de confiance et que le prochain président de l'organe législatif de l'Union européenne aura bien besoin de paraître le plus légitime possible. D'autant qu'il succédera à Martin Schulz, lequel a su utiliser le traité de Lisbonne (2009), pour poser les bases d'une présidence forte.

Les règles prévoient que le président doit être élu à la majorité des voix. Si aucun candidat n'atteint les 50%, trois tours de scrutin sont prévus. Au quatrième et dernier tour, c'est le candidat ayant la majorité relative qui l'emporte.

Alexandre Keller

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