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Fin de la mutinerie en Côte d'Ivoire : Ouattara appelle la population à «vaquer à ses occupations»

Alors que des soldats réclamant de meilleurs conditions de travail paralysaient plusieurs villes du pays depuis deux jours, la situation s'est normalisée en Côte d'Ivoire après la conclusion d'un accord et les barrages ont été levés.

Dimanche 8 janvier

«Après les événements regrettables de ces derniers jours, la situation est rentrée dans l'ordre et chacun peut vaquer à ses occupations» a déclaré le président ivoirien sur Twitter.

La Côte d'Ivoire semblait se diriger vers une sortie de crise après l'accord conclu entre le gouvernement et les soldats mutins qui réclament une amélioration de leurs conditions.

L’accord avait été scellé le 7 janvier à Bouaké à l'issue d'une rencontre entre le ministre ivoirien de la Défense Alain-Richard Donwahi et des soldats mutins, qui réclament le paiement de primes, des augmentations de solde, une promotion plus rapide entre les grades et des logements.

Des militaires en colère avaient cependant empêché le ministre et sa délégation de quitter la résidence du sous-préfet en tirant des rafales de Kalachnikov et à l'arme lourde.

Alain-Richard Donwahi et sa délégation n'ont finalement été retenus que pendant un peu plus de deux heures, avant de quitter la deuxième ville du pays. Ni le ministre ni les représentants des mutins n'ont fait de déclaration à leur sortie.

Après la libération du ministre, les militaires ont levé les barrages interdisant l'entrée dans Bouaké. 

Dans une brève allocution télévisée en début de soirée, Alassane Ouattara avait annoncé son «accord pour la prise en compte des revendications relatives aux primes et à l'amélioration des conditions de vie des soldats». «Ayant marqué mon accord, je demande à tous les soldats de regagner leurs casernes pour permettre l’exécution de ces décisions dans le calme», avait-il dit.

Barrages levés

A Abidjan également, la capitale économique ivoirienne, - siège de la présidence, du gouvernement et du Parlement de ce pays d'Afrique de l'Ouest - la situation s'était tendue le 7 janvier.

«Des tirs ont été entendus ici à Abidjan à la caserne d'Akouédo», a affirmé un présentateur sur la télévision nationale. 

Des soldats ont bloqué l'accès à un carrefour stratégique situé près de ce camp militaire, dans le quartier chic de Cocody. 

«Les militaires étaient arrêtés au rond-point devant le camp, demandant aux automobilistes de faire demi-tour. Ca a créé la panique. Tous les magasins aux alentours ont fermé. Les militaires portaient des cagoules», a rapporté un journaliste ivoirien à l'AFP.

Selon des images diffusées à la télévision nationale dans la soirée du 7 janvier, le calme était cependant revenu devant le camp où la circulation a repris.

Des journalistes de l'AFP avaient également vu des barricades près d'une caserne de sapeurs-pompiers, dans le centre d'Abidjan. Une dizaine de militaires en treillis et armés ordonnaient aux véhicules de faire demi-tour.

Des militaires du groupement de la sécurité présidentielle (GSPR), un corps d'élite, puissamment armés sillonnaient le quartier désert du Plateau, siège de la présidence ivoirienne.

Situation inédite

Cette situation est inédite à Abidjan depuis décembre 1999, où la mutinerie des militaires avait débouché sur la chute de l'ex-président Henri Konan Bédié (1993-1999).

Le mouvement s'était étendu le 6 janvier aux villes de Daloa et Daoukro (centre), Korhogo et Odienné (nord), où la situation semblait être revenue au calme dès samedi. Le mouvement avait cependant gagné Man, la grande ville de l'Ouest, où des tirs ont été entendus et des militaires ont paradé en ville.

A Bouaké, des tirs sporadiques avaient succédé le 7 janvier aux tirs d'arme lourde de la matinée et de la nuit. Mais ces tirs ont cessé après la libération du ministre.

Ecoles et commerces sont restés fermés le 7 janvier dans cette ex-capitale de la rébellion qui contrôlait le nord du pays lorsqu'il était coupé en deux entre 2002 et 2011. Cette rébellion était favorable au président Ouattara, alors que le sud du pays était tenu par les forces loyales à l'ex-président Laurent Gbagbo.

Lire aussi :Côte d'Ivoire : trois villes tombent aux mains de militaires mutins, les tirs continuent

Fin 2010, Laurent Gbagbo avait refusé de reconnaître sa défaite à la présidentielle et le pays avait plongé dans cinq mois de violences qui ont fait 3 000 morts.

Alassane Ouattara, qui s'était le 7 janvier samedi au Ghana pour l'investiture du nouveau chef de l'Etat, avait regagné Abidjan dans l'après-midi pour tenir un conseil des ministres extraordinaire.

En novembre 2014 déjà, une vague de protestation de soldats était partie de Bouaké pour s'étendre à d'autres villes pour des raisons liées au non-paiement d'arriérés de solde.

Le gouvernement a présenté récemment une ambitieuse loi de programmation militaire jusqu'en 2020 qui prévoit achats d'équipements et refonte des effectifs. L'armée ivoirienne – 22 000 hommes au total - compte beaucoup trop de gradés pour peu de soldats.