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Le destin de Matteo Renzi suspendu au vote des Italiens au référendum

Les Italiens se prononçaient dimanche 4 décembre sur une réforme constitutionnelle lors d'un référendum qui s'est transformé, en pleine vague populiste, en plébiscite pour ou contre le chef du gouvernement, Matteo Renzi

Quelque 46 millions d’électeurs de la Péninsule ont été appelés aux urnes pour se prononcer en faveur ou contre la réforme constitutionnelle du Parlement.

Le Premier ministre Matteo Renzi a assuré qu'il démissionnerait en cas d'échec, et en l'absence d'alternative claire, l'incertitude quant au résultat provoque des sueurs froides en Europe et sur les marchés financiers, où l'on redoute, après le choc du Brexit et la montée des mouvements populistes, une nouvelle phase d'instabilité dans la troisième économie de la zone euro.

Les bureaux de vote doivent fermer à 23 heures. Le vote par correspondance des quelque 4 millions d'Italiens de l'étranger s'était clôt jeudi soir.

Selon le ministère de l'Intérieur, la participation a atteint 57,22% à 20 heures, un chiffre qui traduit une forte mobilisation de l'électorat.

Les premières estimations issues des sondages de sortie des bureaux de vote sont attendues à la clôture du vote, et les résultats dans la nuit.

Dans une campagne marquée par des attaques de plus en plus féroces entre pro et anti-réforme, une denière polémique est venue émmailler cette journée de scrutin. Elle a concerné les ... crayons avec lesquels les électeurs étaient invités à cocher oui ou non dans les isoloirs.

Le ministère de l'Intérieur avait prévu pour cette consultation des crayons indélébiles mais des électeurs ont assuré qu'ils étaient effaçables.

Ce que n'ont pas manqué de dénoncer aussitôt, en criant à l'irrégularité, les leaders du mouvement populiste «5 étoiles», Beppe Grillo, et de la Ligue du Nord (parti de droite anti-immigration) Matteo Salvini.

Objectif du référendum

Le scrutin porte sur une réforme constitutionnelle qui prévoit une réduction drastique des pouvoirs du Sénat, une limitation des prérogatives des régions et la suppression des provinces, l'équivalent des départements français.

Pour le moment, le système législatif italien est l’un des plus compliqués en Europe. Les lois peuvent être adoptées seulement par la majorité de la Chambre haute du Parlement mais à cause du nombre trop important de de sénateurs, les discussions sur les projets qui leur sont soumis s'éternisent. Pour cette raison, Matteo Renzi a proposé de ramener le nombre de sénateurs de 315 à 100.

La question de la nécessité des changements constitutionnels semble avoir bouleversé l’Italie. Le 27 décembre, des milliers d'Italiens ont marché dans les rues de Rome pour les dénoncer.  

A la veille du référendum, Matteo Renzi avait conseillé à ses concitoyens de bien réfléchir au futur de leurs enfants car dire «oui» aux réformes proposées «ferait l’Italie le pays le plus fort dans l’Europe».

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Les cinq choses à retenir sur le référendum constitutionnel

Ils se prononcent sur une réforme de la constitution qui prévoit essentiellement de réduire les pouvoirs du Sénat, doté actuellement des mêmes pouvoirs que la Chambre des députés. Si le oui l'emporte, le sénat ne votera plus la confiance au gouvernement et ne se prononcera que sur les lois constitutionnelles, la participation de l'Italie à l'UE ou la protection des minorités linguistiques. De 315 membres élus au scrutin universel, il passera à 100 membres nommés.

La réforme limite aussi les attributions des régions et supprime les 110 provinces, des entités territoriales intermédiaires entre les 20 régions et les 8 000 communes.

Matteo Renzi, son Parti démocrate et son allié du Nouveau centre-droit, soutenus par d'anciens chefs du gouvernement comme Romano Prodi et Enrico Letta, assurent que la réforme mettra fin à la valse des gouvernements - 60 depuis l'instauration de la République en 1948 - et au ping-pong législatif entre les deux chambres.

Le patronat mais aussi des personnalités du sport ou du spectacle, ou encore des dirigeants étrangers comme Barack Obama et Angela Merkel, estiment, à des degrés divers, que la réforme modernisera l'Italie et représente un pas dans la bonne direction.

Les opposants à la réforme vont de l'extrême-gauche à l'extrême-droite, en passant par les populistes du Mouvement 5 Etoiles (M5S) ou de la Ligue du Nord mais aussi par le parti Forza Italia de Silvio Berlusconi (centre-droit, qui avait pourtant négocié la réforme avec M. Renzi) et des "frondeurs" du PD.

Tous dénoncent un risque de concentration des pouvoirs entre les mains du chef du gouvernement et une remise en question du délicat équilibre des pouvoirs mis en place en 1948 après le traumatisme du fascisme.

Leur principal dénominateur commun semble être la volonté d'obtenir la démission de Matteo Renzi.

Ce n'est pas automatique, et en tout cas pas avant une réforme de la loi électorale en cours à la Chambre des députés. Parallèlement à la réforme constitutionnelle, le gouvernement Renzi a fait passer une réforme électorale, surnommée «l'Italicum», qui introduit une forte prime majoritaire pour la Chambre des députés et risque de rendre le pays ingouvernable si le Sénat reste puissant et élu à la proportionnelle. Toutes les formations politiques reconnaissent cette nécessité.

De plus, face aux critiques sur le risque de voir gouverner seul un parti - le Mouvement 5 étoiles selon les sondages actuel - qui n'aurait obtenu que 25 ou 30% des voix au 1er tour, Renzi s'est engagé à modifier la réforme, avec un retour à plus de proportionnelle, même en cas de victoire du oui. Mais les détails restent encore flous.

Les partenaires européens et les marchés financiers considèrent qu'un oui renforcerait la stabilité de la troisème économie de la zone euro.

En cas de victoire du non, certains anlystes évoquent un engrenage qui pourrait aboutir à une sortie de l'Italiede la zone euro, en partie à cause de la mauvaise santé des banques. D'autres, plus modérés, n'écartent pas quelques remous mais seulement à court terme.