L'éditorial, titré «Pas de grâce pour Edward Snowden», a été publié alors que plusieurs associations de défense des libertés ont lancé une campagne pour pousser le président Barack Obama à gracier l'informaticien.
La Maison Blanche a opposé une fin de non recevoir à cette demande et réclamé le retour d'Edward Snowden aux Etats-Unis, afin qu'il y soit jugé. Le jeune homme de 33 ans est actuellement réfugié en Russie.
L'éditorial, publié samedi, fait valoir que si certaines révélations de l'ancien consultant de l'agence du renseignement NSA ont été utiles, d'autres étaient injustifiées, voire dangereuses.
En savoir plus : Edward Snowden, lanceur d’alerte ou criminel ? Les législateurs américains veulent son exil à vie
Révélations d'utilité publique
Cette prise de position a déclenché un déluge de critiques, à commencer par celle de Barton Gellman, l'un des journalistes du Washington Post auteur d'articles sur les révélations d'Edward Snowden.
«La page opinion n'a pas d'influence sur la couverture et vient de montrer pourquoi. Les révélations de Snowden ont été d'utilité publique», a-t-il tweeté.
Le Washington Post avait obtenu le prix Pulitzer en 2014, conjointement avec le quotidien britannique The Guardian, pour ses articles sur les informations transmises par l'informaticien.
«Ce qu'a fait Snowden a rendu service aux citoyens américains et le président des Etats-Unis devrait le gracier», a abondé Margaret Sullivan, éditorialiste du Washington Post.
La journaliste a écrit un éditorial, publié mardi, qui appelle à pardonner celui auquel le réalisateur américain Oliver Stone a consacré un film, sorti la semaine passée aux Etats-Unis (le 1er novembre en France).
«Il me semble qu'un organe de presse qui s'appuie sur une source, au risque de la mettre en danger, doit la soutenir», a dit, à l'AFP, Jane Kirtley, professeur de droit et d'éthique des médias à l'université du Minnesota.
«Pour moi, Snowden devrait rentrer et se présenter à la justice, mais je n'ai pas pris les fuites de Snowden pour en tapisser mon journal», a-t-elle ajouté.
Pour elle, «s'en prendre aux sources pour des fuites en s'appuyant sur la loi sur l'espionnage est un premier pas avant d'en faire de même avec les journalistes qui ont reçu cette information».
Le Washington Post vient de devenir «le premier journal (américain) à demander dans ses colonnes que des poursuites soient engagées contre l'une de ses sources, sur le dos de laquelle elle a gagné et accepté le prix Pulitzer pour oeuvre d'intérêt général», s'est indigné Glenn Greenwald, ancien du Guardian aujourd'hui journaliste pour le site The Intercept.
Pour le spécialiste des médias du magazine Forbes, Matthew Ingram, l'éditorial du Washington Post va «pousser les futurs Snowden à réfléchir à deux fois à l'idée de contacter ce journal avec une fuite ou un tuyau, c'est quasiment certain».