Au vu de la grave crise humanitaire que connaît la bande de Gaza, le retour de cette traditionnelle soupe populaire s'est imposé comme une évidence. «La Tekkiya est un élément de la culture, du patrimoine et de l'histoire» palestinienne, explique Hassan al-Khatib, qui dirige celle de Gaza.
La Tekkiya serait née à Hébron, dans le sud de la Cisjordanie, l'autre territoire palestinien occupé par Israël. Abraham, le patriarche enterré à Hébron, selon la tradition avec sa femme Sarah et ses fils, aurait été le premier à déposer de la nourriture pour que les indigents puissent se servir. La Tekkiya de Hébron se dresse aujourd'hui encore sur les lieux présumés des dons opérés par la figure biblique.
«Chaque jour, entre 150 et 200 familles» viennent chercher à manger à la Tekkiya de Gaza
Les distributions de nourriture telles qu'elles se pratiquent encore aujourd'hui ont été relancées à Hébron, au XIIIe siècle, où elles ont lieu tout au long de l'année. A Gaza, en revanche, les crève-la-faim envisagent avec angoisse la fin du ramadan le 5 juillet car elles devraient quitter leur rythme quotidien pour ne se tenir que deux fois par semaine. Pire, la Tekkiya pourrait s'arrêter si les dons privés envoyés de l'étranger pour la financer venaient à se tarir.
L'aide humanitaire, dont dépendent huit Gazaouis sur dix, ne suffit pas. «Chaque jour, entre 150 et 200 familles» viennent chercher à manger à la Tekkiya de Gaza, affirme encore Hassan al-Khatib. D'autres se rendent à celle de Khan Younès, plus au sud.
Selon la Banque mondiale, 39% des Gazaouis vivent sous le seuil de pauvreté
La population qui fréquente ces Tekkiyas est extrêmement diverse, assure Dib Abdel Halim, 24 ans, qui fait du bénévolat caritatif depuis des années et qui est aussi volontaire pour cuisiner et servir à la Tekkiya. «La cible prioritaire, ce sont les foyers qui ont perdu leur soutien de famille : les veuves, les divorcées ou les femmes dont les maris ont émigré», explique-t-il.
Mais parmi les dizaines de Gazaouis qui fréquentent cette soupe populaire traditionnelle, on trouve aussi des salariés qui se pressent pour retirer leurs repas, ajoute Dib Abdel Halim qui est par ailleurs titulaire d'un diplôme universitaire mais ne trouve pas de travail.
Il faut savoir qu'avec un taux de chômage culminant à 45%, l'enclave palestinienne, régulièrement ravagée par la guerre, figure parmi les régions du monde où le nombre de personnes sans emploi est le plus élevé. Selon la Banque mondiale, 39% des Gazaouis vivent même sous le seuil de pauvreté.