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La visite verrouillée de la délégation européenne dans un camp de réfugiés en Turquie

De hauts responsables européens ont visité un camp de réfugiés turc et félicité le président Erdogan pour ses efforts. Mais cette visite, bien préparée, leur a-t-elle donné une vraie représentation de la façon dont Ankara traite les réfugiés ?

La délégation des dignitaires européens, comprenant notamment la chancelière allemande Angela Merkel, le président du Conseil européen Donald Tusk et d’autres hauts responsables, arrivés en Turquie pour faire avaler l’accord en vertu duquel Ankara a promis d’aider l’Europe dans la gestion de la crise migratoire.

Ils ont visité le camp de la ville de Nizip, près de la frontière syrienne, qui abrite plus de 4 800 réfugiés. Comme Angela Merkel l’a expliqué, elle a voulu voir les comment se passaient les choses pour les réfugiés arrivés en Turquie.

Le Premier ministre turc Ahmet Davutoglu a accueilli la délégation et a même traduit personnellement ce que des réfugiés disaient à Angela Merkel. Les politiciens européens ont posé avec quatre jeunes femmes vêtues de tenues blanches de cérémonie avant de serrer la main des cinq hommes Syriens et de leurs enfants.

Des nombreux éléments ont montré que cette visite avait été soigneusement préparée. Tous les autres réfugiés ont été cachés et les journalistes n’ont pas pu leur parler. Quand la délégation a quitté le camp, plusieurs enfants syriens ont chanté «La Syrie et la Turquie sont ensemble» en arabe. Un réfugié a déclaré : «Qu’Allah donne de la force au président Erdogan».

Les réfugiés n’étaient pas les seuls à chanter des louanges au président turc. Ainsi, lors d’une conférence de presse Donald Tusk a déclaré : «La Turquie est le meilleur exemple pour le monde entier de comment traiter les réfugiés. Personne n’a pas le droit de faire la leçon à la Turquie sur ce qu’elle doit faire».

Angela Merkel, pour sa part, a considéré l’émission de permis de travail pour les réfugiés syriens par la Turquie comme «une mesure très courageuse». «Nous avons vu que les Syriens étaient adoptés ici en tant que société. La Turquie est le pays qui a accepté le plus grand nombre de réfugiés. L’UE doit également assumer ses responsabilités», a poursuivi la chancelière.

Mais de nombreux réfugiés vivent en Turquie dans des conditions bien pires que celles qu’ont pu observer les responsables européens à Nizip. Selon le réseau Syria Relief, une coalition d’ONG, seul un tiers des enfants réfugiés syriens vont à l’école en Turquie. Ils sont en outre nombreux à devoir travailler.

«Leurs familles peuvent gagner seulement 100 dollars par mois, les parents envoient leurs enfants travailler», a confié à The Guardian Abou Chihab, un manager syrien dans un magasin turc qui emploie des enfants syriens. «C’est vrai que le camp à Nizip est très joli. Mais qu’en est-il de ceux qui vivent hors des camps ?», se demande-t-il.

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