Le 6 avril dernier, un jeune passager passait un coup de fil à son oncle alors que son avion, encore sur le tarmac, n'avait pas encore décollé de l'aéroport de Los Angeles. Syrien vivant aux Etats-Unis, Khairuldeen Makhzoomi voulait raconter à son oncle vivant à Bagdad une rencontre avec Ban Ki-Moon. «J'étais vraiment excité au sujet de cet événement, donc je l'ai appelé pour lui raconter», a-t-il expliqué après s'être fait expulser. Inscrit à l'université de Berkeley, l'étudiant de 26 ans voulait relater un repas partagé avec le secrétaire général de l'Onu durant lequel il lui a posé une question sur l'organisation Etat islamique.
Menée en arabe, la conversation a effrayé le voisin du jeune homme, qui a prévenu un membre de l'équipage. Un employé arabophone de la compagnie Southwest Airlines est alors venu interpeller le jeune homme, lui demandant pourquoi il avait parlé arabe. Il l'a ensuite escorté hors de l'avion et il lui a signifié qu'il ne pourrait pas remonter à bord. Khairuldeen Makhzoomi, que le New York Times a pu contacter, s'est dit effrayé et a rapporté qu'on lui avait parlé comme à un animal. Fouillé puis interrogé par des agents du FBI, il a finalement été innocenté.
Meghary Yemane-Tesfagiorgis, jeune londonien originaire d’Erythrée a fait lui aussi la mauvaise expérience d’être expulsé d’un avion d'Easyjet sur un vol Rome-Londres suite à la dénonciation d’une passagère. Cette dernière a indiqué au personnel de bord «ne pas se sentir en sécurité» étant assise à côté de lui.
«On m’a demandé de me présenter à l’avant de l’avion où j’ai été accueilli par un policier armé. Le capitaine m’a demandé de bien vouloir quitter l’avion. Quand j’ai demandé pourquoi, il m’a expliqué qu’un passager ne se sentait pas en sécurité avec moi dans l’avion» a-t-il raconté lors d'une intervention sur la chaîne anglaise ITV News London.
Yemane-Tesfagiorgis surprit et choqué s’est expliqué de longues minutes avec le personnel de bord. Il a alors demandé à ce que ce soit la femme qui sorte de l’avion si cette dernière ne se sentait pas en sécurité. Rien n'y fit, le capitaine avait décidé de débarquer le jeune homme.
Au poste de police de l’aéroport, il sera interrogé et intimidé pendant 15 heures «avant d’être abandonné sur un siège». Devant le manque d’éléments pour le garder, les forces de sécurité ont été forcées de le relâcher tout en indiquant à la compagnie Easyjet qu’il n’était aucunement dangereux.
Malgré les excuses de la compagnie aérienne, Meghary Yemane-Tesfagiorgis se sent humilié et «violé».
Le jeune londonien a fait savoir qu’il envisageait une action en justice afin de dénoncer la multiplication de ces «délits de faciès» et ce «profilage racial».
Selon le Conseil des relations entre Américains et musulmans, une association américaine, il y aurait eu six expulsions de ce type aux Etats-Unis depuis janvier. «Nous sommes inquiets car de plus en plus souvent, les musulmans sont exposés, scrutés et harcelés lorsqu'ils voyagent», déplore la directrice Zahra Billoo.