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Arménie vs Azerbaïdjan : tout savoir sur le conflit éclaté dans le Haut-Karabagh

Dans la nuit de vendredi à samedi, le Haut-Karabagh a connu ses plus meurtriers affrontements depuis 1994, dans cette région d'Azerbaïdjan à majorité arménienne qui a proclamé son indépendance en 1991 et que se disputent Bakou et Erevan.

La Russie et les Etats-Unis ont appelé à un cessez-le-feu immédiat dans le Haut-Karabagh, territoire disputé où au moins 30 soldats ont été tués samedi dans des combats entre forces azerbaïdjanaises et arméniennes.

Des combats impliquant de l’artillerie, des chars et des avions ont éclaté samedi tôt le matin sur la ligne de contact entre l’Azerbaïdjan et le Haut-Karabagh. Pour l’instant il n’est pas clair qui est responsable de cette escalade dans la région étant donné que Bakou et Erevan s'accusent mutuellement.

Ces hostilités déclenchées ont déjà fait au moins 30 morts. Au moins «douze soldats azerbaïdjanais ont été tués au combat et un hélicoptère a été abattu par les forces arméniennes», a déclaré dans un communiqué le ministère azerbaïdjanais de la Défense.

Selon le président arménien Serge Sarkissian, de son côté «18 soldats ont été tués et environ 35 blessés» par les forces azerbaïdjanaises le long de la frontière de la région séparatiste du Haut-Karabagh.

Une solution militaire possible ?

L'Azerbaïdjan a pris dimanche la décision unilatérale de cesser toutes les opérations militaires à la ligne de contact dans le Haut-Karabagh, selon le ministère de la Défense azerbaïdjanais. En revanche, il a été précisé que les actions militaires reprendront en cas d'attaque de l'autre partie. Erevan prétend de son côté que cette déclaration de cessez-le-feu ne correspond pas à la réalité. 

Cependant, le 2 avril, l'ambassadeur d'Azerbaïdjan en Russie, Polad Bulbuloglu, commentant l’escalade de la situation, a noté que Bakou était prêt à passer d'une solution diplomatique à militaire au problème du Haut-Karabagh.

«Des efforts pour une solution pacifique étaient en cours pendant 22 ans. Nous sommes prêts à aboutir à une solution pacifique à ce problème. Mais s’il n’est pas résolu de manière pacifique, nous le règlerons par des moyens militaires», a-t-il prévenu lors de son interview à la station de radio Govorit Moskva.

Selon l’ambassadeur, 21% du territoire azerbaïdjanais est occupé aujourd’hui par l’Arménie. Le compromis de la part de Bakou est représenté par une offre d’abandonner le territoire disputé. Juste après cela, le dialogue concernant la coexistence d’Azéris et d’Arméniens dans le Haut-Karabagh pourrait être entamé, a souligné Polad Bulbuloglu.

Le président arménien a à son tour promis que son pays allait exécuter toutes les obligations pour garantir la sécurité de la région en cause. «Nous avons le droit de le faire, puisque nous faisons partie de l’accord de cessez-le-feu signé en 1994», a-t-il expliqué.

Soutien d'Ankara à Bakou

Après avoir appris que des affrontements avaient eu lieu dans le Haut-Karabagh, le président turc Recep Tayyip Erdogan a appelé son homologue azerbaïdjanais, Ilham Aliev, pour exprimer ses condoléances pour la mort des soldats azerbaïdjanais dans la région.

«Le président turc a exprimé son soutien et sa solidarité concernant les événements [ayant lieu] sur la ligne de contact entre l’Arménie et l'Azerbaïdjan et a souligné que le peuple turc sera toujours avec le peuple azéri», a indiqué le service de presse d’Ilham Aliev dans un communiqué.

Plus tard dans la journée Recep Erdogan a accusé l’inaction du Groupe de Minsk pour le litige non résolu dans la région, a rapporté le journal Aksam. «Si le Groupe de Minsk avait réglé le problème en temps utile, nous ne serions pas les témoins des événements ayant lieu aujourd’hui sur la ligne de contact», a indiqué le président turc.

Il est à noter que la Turquie fait partie du Groupe de Minsk, qui comprend la Russie, les Etats-Unis et la France en tant que coprésidents, et qui comprend aussi la Biélorussie, l’Allemagne, l’Italie, la Suède, la Finlande et les deux pays en conflit.

Lors de son entretien avec son homologue azerbaïdjanais, le ministre de la Défense turc Ismet Yilmaz a exprimé son soutien absolu envers Bakou, en accusant l’Arménie d'avoir initié l’agression et a appelé Erevan à respecter les conditions du cessez-le-feu.

Appels au cessez-le-feu

Paris, Moscou et Washington, les acteurs clés du Groupe de Minsk, chargée dans le cadre de l’OSCE d’une médiation entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan afin de trouver une solution négociée au conflit du Haut-Karabagh, se sont tous prononcés samedi en faveur d'un cessez-le-feu immédiat, insistant sur la tenue de négociations.

«Il n'y a pas de solution militaire à ce conflit», a déclaré le secrétaire d'Etat américain John Kerry soulignant sa vive préoccupation devant le risque d'une escalade. Vladimir Poutine condamnant de son côté les affrontements, a appelé «les deux parties à faire preuve de retenue pour éviter qu'il y ait de nouvelles victimes».

Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a réclamé un «arrêt immédiat des combats». Il s'est dit «particulièrement préoccupé par l'usage d'armes lourdes et par le grand nombre de victimes, dont des civils».

La responsable de la diplomatie de l'Union européenne, Federica Mogherini, a elle aussi «appelé à la fin immédiate des combats et au respect du cessez-le-feu» de 1994, de même que le secrétaire général du Conseil de l'Europe, Thorbjoern Jagland.

L’Arménie et l’Azerbaïdjan sont enfermés dans des décennies de conflits dans le Haut-Karabagh, région montagneuse majoritairement arménienne qui faisait partie de l’Azerbaïdjan jusqu’en 1988 avant de déclarer son indépendance en 1991.

Depuis lors, les tensions entre les deux pays n’ont jamais cessé. Malgré la signature en 1994 d'un cessez-le-feu, aucun traité de paix n'a été signé. L'Azerbaïdjan menace périodiquement de reprendre par la force la région séparatiste si les négociations n'aboutissent pas. L'Arménie estime pour sa part qu'elle pourrait faire face à toute offensive.