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Tobrouk : la frappe américaine est une violation flagrante de la souveraineté de l'Etat libyen

A Tobrouk, le gouvernement libyen reconnu par la communauté internationale a condamné le raid aérien américain du 19 février contre des djihadistes à l'ouest de Tripoli, estimant qu'il s’agit d'une violation de la souveraineté de la Libye.

Dans un communiqué, le gouvernement «condamne et réprouve les frappes menées par l'aviation des Etats-Unis (...) sur des sites précis» à Sabrata, précisant que des telles frappes sans coordination avec les autorités représentent «une violation flagrante de la souveraineté de l'Etat libyen».

Les autorités libyennes reconnues par la communauté internationale ont rendu la communauté internationale «responsable de la détérioration de la situation économique intérieure, sociale et sécuritaire qui a provoqué le développement de ces organisations [terroristes]» en Libye.

Le gouvernement de Tobrouk a également ajouté que qu’une «ingérence militaire ou politique dans les affaires libyennes doit être effectuée légalement via le parlement et le gouvernement nouvellement formés».

La frappe aérienne américaine dans l’ouest de la Libye aurait tué plus de 40 personnes.

Les Etats-Unis avaient-ils le droit de bombarder un camp de Daesh en Libye ?

Les Etats-Unis ont confirmé leur frappe contre un camp de Daesh en Libye et l’ont même qualifiée de «succès», sans exposer la base légale sur laquelle ils avaient agi. Le département d’Etat se réfère au droit international sans autre précision.

Lors d’une conférence de presse, le porte-parole du Pentagone, Peter Cook a dû répondre une question lui demandant d’expliquer de quel droit les Etats-Unis étaient intervenus en Libye, étant donné qu’aucun citoyen américain n’a été tué lors des attaques terroristes qui ont eu lieu en Tunisie en 2015.

«Nous avons frappé en Libye avec l’autorisation existante pour utiliser la force [militaire]», a répondu Peter Cook.

Le porte-parole a ainsi fait référence à l’autorisation de l’utilisation de la force militaire contre les terroristes adoptée et signée par le président George W. Bush après les attentats du 11 septembre 2011. Ce mandat autorise les forces armées américaines à effectuer des attaques contre les responsables des attentats du 11 septembre 2001.

Le département de la Défense estime donc que cette autorisation peut être utilisée même 15 ans plus tard pour lutter contre Daesh. «Nous pensons que cela a été effectué conformément au droit international et, plus particulièrement, que cette opération respecte le droit national et international», a déclaré Peter Cook sans faire de référence précise.

RT a aussi essayé d’identifier les normes validant cette attaque avec le département d’Etat américain sans toutefois parvenir à trouver de réponse concluante. «Sur quelle base légale les Etats-Unis se sont-ils appuyés pour effectuer ces frappes en Libye ?», a demandé la correspondante de RT à Washington, Gayané Tchitchikyan. «Cela s’est fait en parfaite conformité avec le droit international. Nous en avons  parlé maintes fois. Je vous renvoie auprès du ministère de la Défense pour obtenir plus de détails», lui a répondu Mark Toner, vice-porte-parole du département d’Etat.

«Les Etats-Unis ont frappé une région que Daesh ne contrôle pas»

Pour le spécialiste de l’Afrique Bernard Lugan, il semble bizarre que les Etats-Unis aient frappé la ville de Sabrata qui n’est pas contrôlée par Daesh. «C’est une zone qui est contrôlée par les milices Fajr Libya qui sont des milices salafistes mais qui ne sont pas affilées à Daesh», a confié l’expert à RT. «Alors si à Sabrata, dans une zone contrôlée par ces milices qui ne sont pas affilées à Daesh, les Américains détruisent des terroristes qui sont censés être membres de Daesh, cela veut dire qu’il y a une porosité entre toutes les milices salafistes et que la situation libyenne est beaucoup plus compliquée et beaucoup plus dangereuse que ce que l’on pensait auparavant, car on nous disait que ces milices de Fajr Libya étaient des milices, certes, proches d’Al-Qaïda, mais opposées à Daesh», a indiqué Bernard Lugan.

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