«Nous rembourserons notre dette historique. Dans le passé, nos frères d’Alep ont protégé nos villes de Sanliurfa, Gaziantep, Kahramanmaras, et c’est à notre tour de défendre la ville héroïque d’Alep. Toute la Turquie se tient derrière ses défenseurs», a déclaré Ahmet Davutoglu lors d'une réunion du Parti de la justice et du développement (AKP) qu’il encadre.
Davutoglu faisait apparemment référence à la Première guerre mondiale et aux événements de la guerre d’indépendance turque, en glorifiant la défense et la reconquête des villes turques sur les forces alliées. Mais il a omis de mentionner que les Turcs avaient été entraînés dans la guerre par les ambitions impériales des Ottomans.
La Turquie est entrée en conflit après avoir bombardé le port russe d’Odessa, depuis la mer. Elle a plus tard subi une défaite humiliante infligée par les troupes russes. A cette époque, les trois villes mentionnées par Davutoglu ont été le théâtre du massacre de milliers d’Arméniens et de membres des autres minorités par les nationalistes turcs, dans le contexte général du Génocide arménien, toujours nié par Ankara.
Cette déclaration de Davatoglu a été faite moins d’une semaine après que le ministère russe de la Défense a prévenu que la Turquie préparait l’invasion militaire de la Syrie, tout en essayant de dissimuler son activité illégale le long de la frontière syrienne.
«Nous avons beaucoup d’éléments qui permettent de soupçonner que la Turquie se prépare à une invasion militaire du territoire souverain de la Syrie», a dit le porte-parole du ministère russe de la Défense Igor Konachenkov.
Ces nouveaux développements interviennent alors que les djihadistes qui luttent contre l’armée d’Al-Assad, dans le nord de la Syrie, subissent des pertes et se replient vers la frontière turque.
Le département d’Etat incertain
A la question de RT sur la déclaration alarmante de Davutoglu, le porte-parole du département d’Etat américain, John Kirby, n’a pas donné de réponse claire. «C’est aux Turcs que vous devez demander ce qu’ils veulent dire ou suggèrent dans cette déclaration», a fait savoir Kirby. «Nous continuons de croire en deux choses : la première, c’est qu’il n’y aura pas de solution militaire à ce conflit ; la deuxième est que nous cherchons l’aide de la Turquie dans le front militaire de la lutte contre Daesh», a-t-il fait savoir.
Alors que ce n’est pas la première fois, depuis le début de la guerre civile, que la Turquie menace la Syrie d’une invasion, l’expert du Moyen-Orient, Ali Rizk, prévient qu’Ankara se comporte de manière irrationnelle et que l’on peut s’attendre à tout. «Les Turcs veulent atteindre un but… Ils ont les rêves et les aspirations de l’Empire ottoman. Et ces rêves sont bien liés à ce qui se passe en Syrie, en particulier à Alep qui est considéré par les dirigeants turcs comme une partie de l’ex-Empire», a-t-il souligné. Pour l’expert, il est concevable que cette politique irrationnelle puisse mener à une invasion terrestre ou une intervention militaire.