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Migrants : la Grèce sous pression, menacée d'expulsion de Schengen

Accusée de ne pas contrôler ses frontières, la Grèce est montrée du doigt. Face au flux incontrôlé de migrants, l'Autriche demande son éviction de l'espace Schengen et d'autres vont jusqu'à remettre en cause le principe de libre circulation.

Les conséquences d'un flux de réfugiés incontrôlé 

Accusée de laisser trop de migrants entrer en UE, la Grèce s'est retrouvée lundi sous la pression de ses partenaires européens lors d'une réunion à Amsterdam, également consacrée à la lutte contre le terrorisme. 

Athènes et ses frontières passoires sont en effet au coeur du débat : en 2015, 853 650 migrants sont arrivés en Grèce. Et 2016 s'annonce encore plus chargé : depuis le début du mois de janvier, 31 244 réfugiés ont atteint la Grèce par la mer, soit 20 fois plus qu'en janvier 2015. 

La crise migratoire a donné lieu aux plus vifs débats, étant donné l'insuffisance de résultats des mesures empilées ces derniers mois pour maîtriser un afflux de migrants croissant, allant jusqu'à remettre en question le principe de la libre circulation dans l'espace Schengen.

Les ministres de l'Intérieur des 28 pays membres, réunis sous l'égide de la présidence néerlandaise de l'UE, ont en effet demandé à la Commission Juncker de lancer une procédure qui permettrait d'étendre jusqu'à deux ans les rétablissements de contrôles aux frontières intérieures de Schengen, normalement limités à six mois.

Renforcer les frontières extérieures, mais ne pas exclure la Grèce

L'Autriche, qui fait partie des pays ayant réintroduit de tels contrôles, a mené la charge contre Athènes, qu'elle avait déjà menacée samedi d'exclusion provisoire de Schengen, l'accusant d'être en partie responsable de la situation.

Le scénario de l'expulsion est néanmoins juridiquement impossible, selon une porte-parole de la Commission européenne citée par l'AFP. «On n'a jamais discuté ni d'une suspension de Schengen, ni d'une exclusion d'un membre de Schengen», tempère -t-elle.

Grace à la France et à l'Allemagne, prêtes à lui accorder quelques semaines de plus pour sauver l'intégrité de l'espace Schengen et permettre à l'UE de reprendre le contrôle de sa frontière en mer Égée, la Grèce bénéficie par ailleurs d'un sursis.

A l'instar de l'Espagne et de l'Italie, l'Allemagne et la France ont également appelé à un renforcement du contrôle des frontières extérieures de l'UE, mais se sont refusés à agiter l'épouvantail d'une exclusion.

«Faire des opérations de sauvetage ou laisser les migrants se noyer»

La Grèce quant à elle, s'est fermement défendue. Son ministre chargé de la politique migratoire, Iannis Mouzalas, a donné une leçon de droit international à ses homologues, affirmant que «la seule façon d'agir à une frontière maritime, c'est de faire des opérations de sauvetage ou alors de laisser les migrants se noyer». Il a également fait remarquer que les Etats qui ont reproché à Athènes d'avoir été réticente à solliciter l'aide européenne tardent aujourd'hui à envoyer des gardes-frontières et le matériel qu'ils devaient lui fournir. 

Frappée de plein fouet par la crise financière, la Grèce se retrouve incapable de faire face à l'afflux migratoire seule.

Allant dans ce sens, Frontex, l'agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l'Union européenne a ajouté que des obstacles «légaux et géographiques empêchent de contrôler efficacement les frontières de la Grèce».  

Expliquant le principe de non-refoulement, Frontex précise ainsi qu'il est légalement impossible de renvoyer chez eux les migrants qui arrivent en bateau, et que selon le droit international, toute personne qui franchit une frontière européenne a la possibilité de déposer une demande d'asile.

Par ailleurs, poursuit la porte-parole de Frontex, il est quasiment impossible de surveiller les frontières grecques, car le pays a une très longue côte et compte des centaines d'îles, dont certaines inhabitées et proches des côtes turques.  

L'espace Schengen menacé ?

A Amsterdam, les ministres européens de l'Intérieur ont par ailleurs demandé à la Commission Juncker de préparer le cadre juridique qui permettrait de maintenir, jusqu'à la fin 2017 si nécessaire, les contrôles frontaliers rétablis par la France, l'Allemagne, l'Autriche, la Suède et le Danemark. 

Pour que cette disposition - dite de l'article 26 - soit appliquée, les Vingt-Huit doivent formellement constater des «insuffisances graves et persistantes» sur la frontière externe de l'UE.

Le constat pointe encore la Grèce du doigt. «Si un pays ne remplit pas ses obligations, il faut limiter ses liens avec l'espace Schengen» défend en ce sens Anders Ygeman, ministre de l'Intérieur de la Suède. 

La majorité des pays membres, l'Espagne en tête, plaident cependant en faveur du maintien de la libre circulation de l'espace Schengen, symbole de l'UE depuis 1995. «C'est l'ADN de l'Union européenne» plaide avec force le ministre espagnol de l'Intérieur, Jorge Fernández Díaz. Selon lui, éliminer la libre circulation en UE aurait un terrible coût politique et économique. 

Si préserver Schengen fait l'unanimité, les pays membres restent sévères à l'égard de la Grèce, même s'ils n'affichent pas clairement une volonté de l'exclure.

«Le fait demeure que nous voulons sauvegarder Schengen, nous voulons des solutions européennes communes, (...), mais si la volonté (des Grecs et des autres Européens) est insuffisante, alors certains d'entre nous en tireront les conclusions», a prévenu Thomas de Maizière, ministre de l'Intérieur allemand. 

Exclure Athènes de l'espace de libre circulation serait-il la solution pour préserver Schengen ? Interrogé sur cette hypothèse, le commissaire européen en charge des migrations, Dimitris Avramopoulos se veut rassurant : «Rien de ce genre n'a été proposé» affirme -t-il.