Depuis le début du mois de janvier, les réseaux sociaux ont vivement discuté de la situation humanitaire désastreuse que connaissent la ville syrienne de Madaya et ses 9 000 habitants. Inconnue jusqu’à récemment, la ville a attiré l’attention médiatique il y a peu, bien qu’elle soit assiégée depuis le mois de juillet dernier. Les principaux médias grand public vont jusqu’à accuser le président syrien Bachar el-Assad d’organiser la famine pour forcer les partisans des rebelles à se rendre.
Certains médias ont fait des titres sensationnels et publié des articles dramatiques.
Reste que personne n’a officiellement confirmé l’authenticité de ces images. «Le Comité international de la Croix Rouge (CICR) ne peut pas confirmer les informations qui ont été publiées sur les réseaux sociaux ou rapportées dans les médias traditionnels», a déclaré un représentant de l’organisation sur la chaîne de télévision libanaise Al-Manar.
Les médias traditionnels n’hésitent pas à publier de fausses images
Ainsi, un homme affamé présenté comme un habitant de Madaya s’est révélé, en fait, être un drogué, dont la photo a été prise en 2009 en Europe. Ses yeux ont été même «photoshopés» pour cacher le fait qu’ils sont bleus. C’est la chaîne de télévision Al Jazeera qui a diffusé cette image qui a été supprimée par la suite. Mais cela n’a pas empêché les internautes de la retweeter à plusieurs reprises.
Une autre image, postée sur les réseaux sociaux arabes, montre un autre homme affamé, les yeux fermés, dans les rues de Madaya. Elle est titrée : «Les victimes de la faim causée par Bachar el-Assad, le Hezbollah et les milices iraniennes à Madaya et Zabadani». En réalité, cet homme est mort de faim dans la ville de Ghouta, dans la banlieue de Damas, il y un an, le 13 janvier 2015, d’après l’Observatoire syrien des droits de l’homme. «Mohammad Yoususf An-Najjar, handicapé, de Damas est décédé le 13 décembre à cause du froid et du manque de nourriture lors du siège de Ghouta par les forces gouvernementales», a fait savoir l’organisation de défense des droits de l’homme.
La photo d’une jolie petite fille syrienne a, à son tour, suscité une avalanche de critiques contre la politique des Bachar el-Assad, car la famine provoquée par les autorités syriennes l’auraient transformée en l’ombre d’elle-même. Mais il s’avère que cette fillette vit saine et sauve en Jordanie. Sa famille s’est dite horrifiée de la voir ainsi utilisée pour de basses manipulations de l’opinion.
The Telegraph et Al Jazeera ont publié l’image d’un garçon affamé, cette fois, qui serait à Madaya.
Mais si l’on enquête un peu, il se trouve que la vidéo de ce garçon a été publiée sur YouTube en mai dernier.
Pourquoi Madaya seulement ?
Si Madaya draine toute l’attention, deux villes chiites assiégées, elles, par des rebelles islamistes, Fuah et Kefraya, restent oubliées. Ceux qui ont réussi à en sortir rapportent que la situation y est désastreuse. «Il y a beaucoup de villes, comme Palmyre ou Raqqa qui sont sous le contrôle de Daesh, la vie là-bas est un véritable enfer. Mais qu’en est-il de Kefraya et Fuah qui sont assiégées par les combattants d’Ahrar al-Sham. Ils bombardent les deux villes chaque jour mais pourquoi les gens n’en parlent pas ? Je pense qu’ils veulent politiser la situation humanitaire», a confié à RT l’analyste politique Taleb Ibrahim.