En Wallonie, la vente d’armements se porte bien, puisque quelques 4,3 milliards d’euros de licences ont été délivrées 2014, soit le plus grand montant jamais enregistré dans l'histoire de cette région de Belgique. En particulier, un énorme contrat de 3,2 milliards d’euros a été conclu entre l’entreprise belge CMI Defence et General Dynamics, une société basée au Canada, pour une durée de 15 ans.
Mais, alors que cette transaction juteuse apparaît, dans les statistiques officielles de la Wallonie, comme une livraison au Canada, la destination finale de ces équipement d’artillerie made in Belgium est toute autre.
Une fois les éléments de CMI Defence réceptionnés, la société canadienne assemble les tourelle-canons fabriquées en Belgique sur des véhicules blindés qui sont ensuite livrés à l’Arabie saoudite. Un «déficit de transparence (…) regrettable», déplore Cédric Poitevin, directeur adjoint du Groupe de recherche pour la paix et la sécurité, interrogé par le journal belge Le Soir.
Celui-ci estime ainsi que la Wallonie a délibérément «choisi» de ne pas mentionner «le pays de destination finale dans son rapport». En effet, la présentation du contrat de 3,2 milliards par les autorités comme étant destiné au Canada modifie radicalement le rapport entre les destinataires des armes produites sur le territoire.
L’expert ajoute qu’«il y a de sérieuses questions à se poser» quant à l’utilisation des véhicules blindés saoudiens qui sera faite sur le terrain du Yémen, où l’Arabie saoudite pratique des bombardements à la tête d’une coalition.
Différentes ONG spécialisées dans les droits de l’homme, comme Human Rights Watch ou encore Amnesty International, pointent régulièrement du doigt les exactions et meurtres de civils commis par Riyad au Yémen.
Alors que les ventes d'armes se décident en Belgique au niveau régional, la Flandre a récemment refusé d'accorder une licence pour exporter l'artillerie belge à la monarchie du Golfe. Le ministre-président Geert Bourgeois avait motivé sa décision en invoquant la vague d'exécutions qui ont eu lieu en Arabie saoudite et le rôle du pays au Yémen.
Soutenant cette vente controversée, le ministre-président de la région wallonne, Paul Magnette, interrogé par la radio nationale Bel RTL le 4 janvier, a tenu à minimiser l'affaire, en rappelant que «la Wallonie est un tout petit vendeur comparé à la France».